From — Corbel (unpublished)
Reflexions Sur L’utilité pour ne pas dire La necessité du papier

Il Est Evident et générallement Reconnu que le numéraire n’est pas assez considerable en france Relativement à L’etendue du Royaume, à La grandeur de son commerce et à La multiplicité de ses habitants. Quelque repugnance qu’on puisse avoir pour les billets, on ne peut s’empêcher de convenir que le papier monnoïé est le seul expedient qui puisse s’admettre Raisonnablement pour tirer La finance de cet Etat de léthargie ou elle est plongée depuis si Longtems, et ce n’est que sur La maniere d’établir ce papier qu’on n’a encore pû s’accorder, parcequ’apparemment tout ce qui a eté presenté dans ce genre etait, ou impraticable ou sujet à trop d’inconvenient. Le projet qu’on propose annonce un avantage immense pour la nation, l’exécution en est facile Et à L’abri de tout inconvenient. Ce sont tous les sujets de Sa Majesté qui se chargent et s’engagent solidairement avec elle de payer toutes les dettes de L’état chacun en raison de son revenu ou de son commerce; et comme cette Espece d’engagement ne regarde que Ceux qui manient de L’argent, le pauvre en est excepté de fait et de droit. C’est La nation entiere qui pour ainsi dire prete son Credit à L’Etat pour acquiter ses dettes, et qui pour ce nouveau pacte devenuë elle-même debitrice, paye à toute heure un acompte sur sa dette d’une maniere si imperceptible, qu’il n’est pas possible qu’aucun de ses membres en Resante jamais La moindre gène: il serait trop Long et sans doutte trop affligeant d’entrer ici dans le detail des maux occasionnés par La rareté de L’espèce; nous ne dirons que deux mots sur Cette Consideration importantes d’ou provient La misere affreuse qui Regne dans la plûpart de nos provinces? La Rareté de L’argent En est La premiere source; Pourquoi ces cannaux abandonnés aussi-tôt que projettés? Pourquoi toutes ces terres Encore En friche? Pourquoi ces manufactures desertes? Pourquoi ces habitans De nos Provinces Septentrionnales perissent-ils de Misere faute de pouvoir se procurer les productions de La terre propres à leur Commerce et à Leurs manufactures, tandis que les anglais Et les hollandais nous vendent ces mêmes marchandises à des prix Exhorbitans? on ne sçaurait trop le redire, La rareté de L’argent produit tous ces maux Rendons à la finance cet Equilibrium qu’elle a perdu depuis si Longtems Et Bientot nous verrons renaitre l’industrie, Bientot Le Commerce reprendra Sa splendeur, Bientot Le Capitaliste Ennuyé de Garder ses fonds ensevelis, et ne trouvant plus d’emplois nouraires dans la capitale, fouillera la terre, Courera les mers. Enfin Ce millionnaire inutile et plongé dans L’inaction devenu tout-à-coup Negociant ou cultivateur Restituera ses tresors à la société.

Memoire

Tous Projets qui tendent au Bien L’Etat Et à L’amelioration des finances, sans être onereux au public, sont sans contredit, susceptible de Réussite

Tel Est celui que le sieur Corbel, a L’honneur de Mettre sous les yeux de Monseigneur Le Controlleur General animé de l’esprit patriotique, il a cru devoir Côoperer à La Recherche que L’on a vainement faite jusqu’a present, des moyens capables de Liberer L’état des dettes contractéës pendant La Guerre derniere, pour Raison des depenses excessives mais indispensable qu’elle exigeait

Ses objets qui Resulteront de L’exécution de ce Projet (dont les fraix par leur modicité seront presqu’insensibles) sont trop importans pour ne pas esperer qu’on ne L’envisage, comme L’unique moyen capable de retablir La tranquillité publique

Objet

1º. Il s’agit d’Etablir sous une certaine denomination, soit des Billets de Commerce pour une fomme quelconque 2º. Qu’en consequence il en serait imprimé une certaine quantité de 50l.t. autre de 100l.t. autre de 200l.t. autre de 300l.t. autre de 400l.t. Et de plus fortes sommes si on le trouve convenable 3º. Ces Billets qui seront Libellés selon qu’il plaira à Monseigneur Le Controlleur General et signés d’un nombre suffisant de personnes Commises à cet effet par arrêt du conseil seront remis dans les Caisses Royales, et par la tresoriers Receveurs et caissiers donnés En payement aux creanciers de L’Etat au prorata de leur dû, pour avoir leur cours et valeur à commancer de L’Epoque qui sera indiquée par le dit arrêt 4º. Ces Billets passeront de La main à La main dans Le Commerce et dechoiront chaque jour jusqu’a leur extinction

Sçavoir
de 3q Par Billet de .............50 l.t.
de 6q Par idem de................100"
d’un sol Par idem de.............200"
d’un sol six Par idem de.........300"
Et de 2s. par idem de............400"

5º. Dans tous Les Payemens qui seront faits les Billets seront accompagnés d’une somme en argent fixe jusqu’à leur extinction sçavoir

Ceux de50l.t..............de.......25l.t. En argent
Ceux de100l.t..............de.......50"idem
Ceux de200"................de.......100"idem
Ceux de300"................de.......150"idem
Et Ceux de400.................de.......200"idem

6º. Cette somme fixe en argent qui accompagnera les Billets jusqu’à Leur extinction servira à en supporter La diminution dans leurs derniers tems, Ce qui fera pour Les porteurs de ces Billets un objet de perte d’autant moins sensible qu’il sera de leur interets de ne Les garder que le moins de tems qu’ils pourront 7º. Que tres expresses inhibitions et deffences seront faites à tous les sujets du Roy de quelque qualité et condition qu’ils Soient de Refuser les dits Billets En payement, soit de ceux qui Seront Remis dans Leur principe par les tresoriers, Receveurs Et Caissiers, des deniers Royaux, soit par tous autres sujets de Sa Majesté, Et qu’en cas de Refus, ils supporteront le dechet des dits Billets, Comme s’ils etaient En leurs mains 8º. Qu’aucun Remboursement de Contract de Rentes ne pourra se faire avec ces Billets, que conformement aux ternes Constitutifs des dittes rentes

Il est Evident qu’au moyen de La création de ces Billets Le Roy se trouve Liberé, et si les circonstances exigeaient de plus grandes Ressources, Sa Majesté pourrait Créer un nombre d’autres Billets même pendant La circulation de ceux ci

Avantages qui resultent de Lexecution de ce Projet

1º. Les Dettes de L’Etat une fois acquittées, Les Coffres du Roy ne S’ouvriraient que pour Recevoir soit les revenus de Sa Majesté Soit ceux provenants des impots ordinaires, Et des lors ce monarque doüé de Bonté, de Bienfaisance et d’amour pour ses subjets, ne S’occuperait que des moyens de les soulager, soit par la Suppression de certains impots que les circonstances L’ont forcé d’etablir, soit par la diminution de ceux dont le grand taux rend La perception difficile par le defaut de circulation de L’espece et L’assoupissement du Commerce 2º. Cette circulation ayant Lieu par l’ouverture des Coffres, soit de La part des traitans qui tiennent Leur argent En caisse à L’attente de quelqu’evenement favorable, n’osant le placer dans L’apprehension de l’exposer infructueusement, ou plutôt de le perdre par des faillites Et Banqueroutes qui n’ont eté que trop frequentes depuis La paix, et de la part des avares qui n’ont puissé dans leurs tresors en faveur de ceux qui y ont eu recours qu’à un interêt énorme; de la des faillites et des Banqueroutes Eceuils ordinaires du commerce nerf de L’Etat qui ne fait que Languir, et qui se retablirait et prendrait La plus grande Vigueur au moyen de cette circulation de Billets et d’Espèces, avantages qui influeraient necessairement sur les traitans, L’entrepreneur, L’artiste et L’ouvrier, que la fermeture des Bourses Laisse dans L’inaction et une oisiveté forcées 3º. Enfin Le calme et la tranquillité ainsi Retablis dans le Royaume au moyen de ces Billets, dont L’Etablissement est generallement desiré, eviterait un grand nombre de procès, dont Les fraix multipliés Cause incontestablement La ruine d’un Grand Nombre de familles

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