Nous sommes dans de grandes affaires, mon cher amy, je vous ai annoncé par ma derniere du 31 Janv. l’assemblée des notables, elle est aujourdhuy en pleine activité, le controleur général y a declaré un deficit de plus de 100 millions dans les revenus du Roy ce qui est immense, on s’occupe des moynes de le remplir par des economies, de nouvelles formes de perceptions, et sans doute augmentation d’impot, Mr. Grand a du envoyer a Mr. franklin la liste des notables, les discours et les objets de deliberation. Il paroist certain que les administrations provinciales seront etablies partout qu’il y aura un impot teritorial mieux reporté par le moyen du cadastre quelles feront, et dont personne même les prêtres ne seront exempts; on vouloit dabord qu’il fut en nature, ce qui etoit impraticable il sera donc en argent. On suprime les traites intérieures, de province a province, cet éspéce d’impot ne sera perçu qu’aux frontieres, on change la forme de l’impot sur le sel etc. etc. mais les notables demandent a verifier le compte rendu par le controleur general et malgré quelques difficultes, ils persistent dans cette intention qu’on promet de satisfaire, on a quelques mois de bonification, l’établissement des assemblées provinciales est au moins le germe d’un bien futur.
Mr. Brillon est toujours a Nice et j’ay grande peur qu’il n’en revienne pas, on a les plus mauvaises nouvelles de luy, l’hydropisie et l’influx paroissent declarées, il est avéc Mr. de Cordognan[?], il a éxigé que personne ne l’accompagnât et ne l’allât joindre.
Il me paroist que vos affaires generales ne s’arrangent guere, la consistance de vostre congrés est bien incertaine, ils [ont] bien peu de pouvoir et d’activité, l’éxécution entiere du traité de paix tarde bien a s’accomplir et vous n’avezpas l’air d’estre sitost quittes de vos dettes. Tous vos amis en sont chagrins.
Mr. Adams vient de publier un livre que je nai point lu; on m’a dit qu’il y traitoit de la necessité de composer la legislature de différents corps.
J’écris a vostre ayeul quoy qu’il semble m’avoir absolument oublié, depuis mars je n’ai point de lettre de luy, cette indifference m’aflige beaucoup. Il n’aime donc que ce qu’il voit. Je ne luy ressemble point, je vous aime tous comme quand vous etiez ici et mes sentiments dureront autant que moy. Vous me causeriez aussi le chagrin le plus vif, mon cher amy, si vous m’oubliez comme le grand papa, assurez moy que vous n’en estes pas capable et que vous me regarderez toujours comme un de vos plus chers et plus surs amis