Les hauts Talens, dont est döuée Votre Excellence, qui ont attiré sur elle, Monseigneur, les Regards et la Confiance de l’Amerique non seulement, mais encore de toute l’Europe et pour mieux dire de tout le monde connù, engagent le suppliant à s’adresser directement à Votre Grandeur, pour qu’il luy plaise d’honnorer d’un mot de Reponse le mémoire qui suit.
Le suppliant, pour cause de santé, se trouve forcé d’habiter un Pais chaud: la Virginie, lui ayant paru le plus propre à remplir ses vües, il a recours à Vôtre Excellence, pour implorer l’honneur de sa protection.
Il désire un carré de terres, bonnes, mauvaises, boisées, sous les eaux, telles enfin qu’elles se trouveront, si la Nature y est brute; contenant plusieurs milliers d’acres ou arpens à 6. ou dix mille d’une ville, a portée d’un port navigable etc. Combien luy coûtera une telle Concession? Ou peut il esperer trouver à achepter une ou plusieurs habitations se reunissant pour former une terre conséquente? Si telle chose se rencontroit par l’abandon qu’en feroient des loyalistes il seroit disposé à y placer jusqu’à soixante mille livres tournois, même audela, payable de ce jour jusqu’en 1790.
La Confiance dont jouit le suppliant dans ce Pais, fait que des familles entiéres luy offrent leurs bras: dans la persuasion qu’il est trop sage pour sacriffier ses interêts et sa vie, sans un motif bien certain: mais craignant que ces hommes une fois émigrés, et trouvant aprés quelqu’années de séjour, plus avantageux de se fixer pour leur compte, plutot que de rester à son service, colons comme ils le sont en france, il demande par quelle loix il pourroit s’assurer de leur fidélité. Ne serait-il par cruel pour luy de voir des habitations désertes, si aprés quelques années ces colons avoient la faculté, de se placer pour leur compte. Dans ce cas il conviendroit aux intêrets du suppliant de se retourner du coté des Esclaves.
Plus de 600. personnes, Monseigneur, s’offrent de le suivre et ce nombre s’accroitroit à l’infini si ses facultés le permettoient. Il est donc de sa prudence de s’assurer du parti qu’il en pourra tirer.
Le Commerce, annéanti partout, fait croire au suppliant qu’il doit passer ses fonds en Espèces et materiel pour l’agriculture et non en Marchandises.
Deux de ses Parents s’offrent a le suivre pour former chacun leur habitation et joindre à une agriculture suivie, le commerce, source inépuisable d’hommes robustes, opulents et fiers; ce qui constitüe la force d’un Empire.
Les suppliants plus jaloux du titre de citoiens des Etats unis que des vains titres de leur Monarchie demandent la dessus vos bons avis, et l’honneur de la protection de Votre Excellence: et par Elle, la bienveillance du Gouvernement de la contrée qu’ils se proposent d’habitter, et tous les secours qu’ont droit d’attendre des hommes vertüeux dont l’acquisition ne peut qu’être agrèable a tout etat quelconque.
S’il etoit nècéssaire d’une Recommandation, le suppliant offriroit celle de Mgr. le Prince de l’Ambesc, mais il croit superflu, toute autre que sa personne son argent, et la Votre Monseigneur, auprés de l’Etat ou il se fixera. Un citoien de l’amèrique est libre et ne doit se courber que devant son Createur, et ses Magistrats: a luy seul il doit devoir tout le Reste, ou il cesse d’être homme; c’est avec ces sentiment Monseigneur, que les suppliants vous offrent leurs personnes, c’est avec le plus profond Respect, qu’ils attendent votre agrément, pour etre dans le cas d’accroitre la population et les Richesses de la Virginie esperant de Vôtre Excellence tous les secours dont ils ont besoin et d’une lettre de Recommandation pour leur Départ. Ce faisant le suppliant ne cessera de former des Voeux et de Vous voüer tous les sentiments du profond Respect, avec lesquels il est, De Votre Excellence Le trés humble et trés obeissant serviteur