From Charles-Guillaume-Frédéric Dumas: Memoir
(unpublished)
[The Hague, October 6, 1785]
Mémoire
J’avois L’honneur, depuis 1768, d’être en correspondance avec
Mr. le Dr. Franklin, alors à Londres, jusqu’en 1775, où, le
sachant de retour à Philadelphie, je lui recommandai des
Passagers, qui lui remirent de ma part un petit présent de Livres
nouveaux, en reconnoissance d’autres curiosités que je tenois de
son amitié.
[in another hand:] Voir une liste part. du 14 Xbre
1785.
Il me favorisa en réponse d’une longue et très importante
Lettre en date du 9 Décembre 1775, dont je ne transcrirai que les
passages suivants.
Je vous suis fort obligé du présent que vous nous faites de
votre Edition de Vattel. Il nous vient bien à propos, dans des
circonstances où notre Etat s’élevant, nous met dans le cas de
devoir souvent consulter le droit des Gens. En conséquence, après
avoir déposé un Exemplaire dans notre Bibliotheque publique ici,
et envoyé l’autre au College de Massachusetts-Bay, selon vos
directions, L’Exemplaire que j’ai gardé a été continuellement
entre les mains des Membres de notre Congrès actuel, qui goûtent
beaucoup votre préface et vos notes, et ont conçu une haute et
juste estime pour leur auteur. Votre idée manuscrite sur le
Gouvernement et la Royauté plait également, et peut avec le temps
avoir son effet. Je vous remercie aussi des autres petites Pieces
qui accompagnoient Vattel. Le Court Exposé de ce qui s’est passé
entre la Cour Brit. et les Colonies, etc. étant un état bien
précis et clair des faits, sera réimprimé ici pour l’usage de nos
nouveaux amis au Canada. La Traduction des productions de notre
congrès fera grand plaisir. Je vous en envoie ici ce qui a été
publié ultérieurement. etc.
L’Angleterre nous menace de forces très puissantes, qu’elle doit
envoyer contre nous l’année prochaine. Nous nous occupons à
prendre toutes les mesures en notre pouvoir ici pour résister à
ces forces; et nous espérons d’être en état de nous defendre. Mais
comme les évenemens de la guerre sont toujours incertains, il se
peut qu’après une autre Campagne nous trouvions nécessaire de
demander le secours de quelque Puissance étrangere. Ce que vous
dites, que toute l’Europe nous souhaite le plus heureux succès
pour le maintien de nos libertés, nous fait grand plaisir. Mais
nous voudrions savoir si quelqu’une de ses Puissances, par
principe d’humanité, et par magnanimité, seroit disposée à
s’interposer en faveur d’un peuple opprimé; ou bien, en posant le
cas qui plus vraisemblablement arrivera, où nous serions obligés
de rompre toute connexion avec la Grande Bretagne, et de nous
déclarer Peuple indépendant, s’il y a quelque Etat ou Puissance en
Europe qui voudroit entrer en alliance avec nous, pour profiter du
bénéfice de notre Commerce, qui alloit avant la guerre à près de 7
millions Sterlings par an, et qui doit aller toujours en
augmentant, vu la grande rapidité avec laquelle notre peuple
s’accroît.
Dans la confiance que nous avons, mon cher Ami, en votre bonne
volonté pour nous et pour notre cause, ainsi qu’en votre sagacité
et habileté dans les affaires, le Committé du Congrès, nommé pour
établir et tenir une Correspondance avec nos Amis en Europe,
duquel Committé j’ai l’honneur d’être Membre, m’a chargé de vous
prier, placé comme vous l’êtes à La Haie, où résident les
Ambassadeurs de toutes les Cours, de profiter de l’opportunité que
cette position vous procure, pour découvrir, s’il est possible, la
disposition des différentes Cours par rapport à une telle
assistance ou Alliance, au cas que nous implorions l’une ou
proposions l’autre. Comme il peut devenir nécessaire, dans des
occurrences particulieres, que vous confériez, pour cet effet
directement avec quelques grands Ministres, et que vous leur
montriez la présente comme Lettre de créance, nous n’avons rien à
vous dire là-dessus, sinon, de traiter en ce cas l’affaire avec
toute la discrétion et précaution requise, pour qu’elle ne
parvienne point à la connoissance de l’Ambassadeur d’Angleterre,
et d’éviter toute sorte de publicité, quant à présent, en qualité
d’Employé dans une telle affaire; puisque par-là il nous paroît,
non suelement que bien des inconvénients pourront être évités,
mais aussi vos moyens, pour nous rendre service, augmentés.
Pour vous mettre en état de répondre à certaines questions, que
l’on vous fera probablement touchant notre situation actuelle,
nous vous disons:
Que tout ce Continent est très fermement uni; les partisans du
Ministere Britannique étant en fort petit nombre, et dispersés ça
et là:
Que nous avons eu sur pied, pendant la derniere Campagne, une
Armée de 25,000 hommes, avec laquelle nous avons été en état, etc.
etc.
Que nous nous proposons d’augmenter considérablement nos forces
pour l’année prochaine, etc. etc.
Que nous avons actuellement une petite Escadre de Vaisseaux
armée pour protéger notre Commerce côtier etc. etc.
Jusqu’ici nous ne nous sommes adressés à aucune Puissance
étrangere.
Nous mettons toute notre industrie à tâcher de faire du
salpetre, fabriquer des armes, fondre du canon etc. Malgré cela,
nous avons encore grand besoin d’armes et de munitions du dehors.
Tout marchand qui voudra avanturer de nous en envoyer pourra
grandement y profiter. De tout cela le Porteur pourra vous en
informer plus amplement.
Nous avons aussi un grand besoin de bons Ingénieurs; et nous
voudrions que vous pussiez nous en engager et envoyer à temps deux
bien capables, etc. etc.
Tout ce que nous vous demandons, devant non seulement vous
prendre de votre temps, mais vous causer aussi quelques dépenses,
nous vous envoyons, pour le présent, ci inclus une Lettre de
change de 100 Liv. Sterl. pour défrayer ces dépenses, et vous
prions d’être assuré, que vos services seront considérés et
honorablement récompensés du Congrès.
Nous vous prions aussi de recevoir de Mr. Arthur Lee, Agt. du
Congrès en Angleterre, toutes les Lettres qu’il vous adressera
pour en avoir soin, et de nous les acheminer avec vos Dépeches.
Lorsque vous aurez occasion de lui écrire, pour l’informer de tout
ce qu’il peut importer à nos Amis de ce côté-là de savoir,
envoyez-lui votre Lettre sous couvert, etc. et non par la poste.
Et losque vous nous enverrez quelque chose, si vous n’avez pas
d’occasion directe et sure, nous vous recommandons de l’envoyer
par la voie de St. Eustache aux soins de, etc. etc.
/:Signé:/ B. Franklin
à Mr. Dumas
Philadelphie 12 Decembe. 1775.
Nous, soussignés, commis par le Congrès Américain en Committé de
Correspondance étrangere, ayant lu la Lettre ci-dessus écrite à
notre requisition, L’approuvons et la confirmons.
Je reçus cette Commission des mains de l’Exprès en Avril 1776;
et la considérant comme étant ce qu’elle est effectivement, un
Actus ad omnes populos, qui m’étoit adressé en bonne et due forme
par un Committé du Congrès, et par conséquent au nom et de la part
de ce respectable Corps, sans que je l’eusse jamais sollicitée ni
directement ni indirectement; je me dévouai dès ce moment, avec
une ame exaltée par l’honneur qui m’étoit fait, au service d’une
Cause que mon coeur avoit embrassée depuis longtemps: et je n’ai
cessé depuis de suivre mes instructions, et de surpasser même
infiniment le bien qu’on attendoit de moi, avec un zele, une
activité, une circonspection, une discrétion scrupuleuse, une
confiance en l’honneur de mes Commettants, une patience et un
désinteressement, dont j’ose dire que les exemples sont
très-rares. J’ose me glorifier encore d’avoir été le premier des
Serviteurs des Etats-Unis, qui ait fait des Ouvertures de leur
part à la Cour de France (témoin Mr. l’Abbé Des Noyers); et qui
leur ait transmis une réponse verbale, de la part de cette Cour,
très-satisfaisante: témoin la Lettre suivante de Philadelphie 1
Octobre 1776.
Je n’ai que le temps d’accuser la réception de vos deux paquets
A et B, dont le contenu est très satisfactoire. Dans peu vous
entendrez de moi plus au long.
à Mr. Dumas
Mr. Franklin partit effectivement en Octobre 1776 pour sa
Mission en France, où il arriva en Décembre. En Mars précédent il
m’avoit écrit une autre Lettre par Mr. Deane, que voici.
Je vous écrivis dernierement par Mr. Story, et ensuite par une
autre voie. Celle-ci vous parviendra par Mr. Deane, qui fait le
trajet pour affaires du Congrès, et avec qui vous pouvez librement
converser sur les affaires qui vous sont commises de la part de ce
corps. Je le recommande chaudement à vos civilités. Il vous
informera de toutes choses ici
à Mr. Dumas
Je n’ai cessé, d’un côté de correspondre cette année, et toutes
les suivantes, non seulement avec le Congrès, mais aussi avec Mrs.
B. Franklin, Silas Deane, Arthur et Wm. Lee, Carmichael, et puis
aussi avec Mr. Jn. Adams, sur nos affaires publiques, avec une
candeur qui ne s’est jamais démentie pour aucun de ces Messieurs,
et leurs Lettres, que j’ai fait transcrire en deux volumes, et
dont je conserve les originaux, en font foi: et de l’autre, de
préparer par degrés cette nation, et surtout ceux qui la
gouvernent, à reconnoître, comme elle a fait, les Etats Unis, et
admettre leur Ministre. J’en ai pour temoins les Van Berkel, les
Gyselaar, les Visscher, les Zeeberg, les Beyma, les Linden, les
Van Wyn, les Paulus, les Turq, les 7 Pays-Bas-Unis, les François,
les Anglois-mêmes qui m’en ont détesté.
Dans le tems où Mr. Franklin partit de Philadelphie, on
m’écrivit une autre Lettre de la part du Congrès, de Philadelphie
le 24 Octobre 1776, dont voici copie.
M, notre digne ami, le Dr. Franklin étant infatigable dans le
service de son pays, et peu d’hommes étant si capables que lui
d’être utiles à la Communauté dont il est Membre, Vous ne serez
pas surpris de ce que la voix unanime du Congrès des Délégués des
Etats-Unis en Amérique l’a choisi pour visiter la Cour de France,
avec le caractere de l’un de leurs Commissionaires, pour négocier
un Traité d’alliance avec cette Nation. Il est porteur de cette
Lettre, et à son arrivée il vous la fera parvenir. C’est à lui que
nous vous renvoyons, pour vous informer de l’Etat politique de ce
pays; Notre dessein, en nous adressant à vous présentement, étant
uniquemement de communiquer la correspondance qu’il a ouverte et
conduite jusqu’ici avec vous de notre part et pour nous. Nous vous
prions d’avoir fréquemment de vos nouvelles; et Si vous faites
usage du Chiffre, le Docteur en a communiquer la Clé à l’un de nos
Membres. Vos Lettres par la voie de [ici suivent diverses adresses
à St. Eustache et Curaçao] nous parviendront en toute sûreté; et
si vous voulez y joindre des suites régulieres des papiers Anglois
et autres Gazettes, vous ajouterez à l’obligation que nous vous
avons. Votre Dépense pour nous les procurer, vous sera remboursée,
avec une raisonnable allouance pour votre temps et peine dans
cette Agence. Les Membres de ce Committé, nommé le Committé de la
Correspondance secrette, sont John Jay, Esqr., Thos. Johnson
Esqr., Rob. Morris Esqr., Col. Rich. Henry Lee, Wilm. Hooper
Esqr., et le Revd. Dr. John Witherspoon; et quand il arrive
quelque vacance par mort ou absence, le Congrès les remplit par
d’autres membres: ce dont nous faisons mention pour votre
information; et restons avec grand respect et estime, etc.
à Mr. Dumas.
Le 10e. Avril 1778, la Commission Américaine à Paris, m’écrivit
sur l’arrivée de Mr. Adams une Lettre Ministérielle en ces termes.
Nous avons bien reçu votre Dépeche du 3e. court.; et nous
approuvons très fort le soin et la peine que vous prenez, de nous
envoyer les meilleures intelligences sur les affaires étrangeres.
Nous avons maintenant le plaisir de vous informer que Mr. Jean
Adams, membre du Congrès, nommé pour succéder à Mr Deane dans sa
Commission, est heureusement arrivé ici. Il nous apprend que la
proposition a été faite en Congrès d’envoyer un Ministre en
Hollande: mais qu’encore qu’on eût la meilleure disposition envers
ce pays et qu’on desirât d’avoir et d’entretenir une bonne
intelligence avec L.H.P., et un Commerce libre avec leurs sujets,
la chose néanmoins, par égards, a été differée pour le présent,
jusqu’à-ce que leurs sentiments là-dessus soient connus; parce
qu’on appréhende, que peut-être leurs connexions avec L’Angleterre
pourroient leur rendre la réception d’un Ministre Américain peu
convenable, et (si la Hollande avoit la même bonne volonté envers
nous) un peu embarrassante. Peut-être, comme notre Indépendance
commence à prendre l’apparence d’une plus grave stabilité depuis
notre Alliance avouée avec la France, cette difficulté
pourra-t-elle diminuer; ce de quoi nous vous prions de vous
informer sous main en usant pour cela des méthodes les prudentes,
etc. etc.
à Mr. Dumas
A la précédente du 10 Avril, ostensible, étoit jointe une autre
surete, copncernant une Négociation à entamer avec le
Grand-Pensionaire, que j’avois entamée avec Mr. le Pensionaire van
Bl. et le duc De la Vauguyon, et proposée en conséquence à la
Commission. Cette affaire, qui commençoit à bien prendre, fut
gâtée quelques mois après par l’imprudence et l’indescrétion
d’autres gens (Mr. Wm. Lee qui avoit eu connoissance et inspection
de mes Lettres par son frere Arthur Lee : et Mr. De Neufville
Negt. d’Amsterdam) qui s’y ingererent à mon insu, et qui
occasionnerent ensuite un éclat, dont Mr. Van Bl. a été pendant
deux ans l’innocente victime. Les preuves de tout cela se trouvent
dans la Collection des Lettres, tant Ministérielles que
Confidentielles, que ces Messieurs m’ont écrites, et dans celles
que je leur ai écrites.
En Janvier 1779 je proposai à Mr. Franklin d’écrire au Congrès,
pour qu’il me fît expédier une Commission en forme de Chargé
d’Affaires des Etats-Unis auprès de L.H.P. Cette mesure eût fait
alors, et pour toute la suite, un très-bon effet entre mes mains,
en acheminant tout doucement l’admission d’un Ministre Plenipe.,
qui devoit naturellement s’ensuivre, et probablement plutôt
qu’elle n’a eu lieu. Il me répondit le 11e. fevrier 1779
Quant à votre Commission de Chargé d’Affaires, je saisirai le
premiere occasion propre à cela, de la proposer à la considération
du Congrès.
En May 14e. 1778, le Committé des affaires étrangeres m’écrivit
une Lettre, dont voici l’Extrait:
M, Vos differentes faveurs, jusqu’à la Lettre Y nous étoient
parvenues avant le 2e. de ce mois, jour auquel nous reçumes des
Dépeches de nos Commissionaires en France après une Interruption
d’onze mois. Jugez donc, Monsieur, combien vos Lettres doivent
nous avoir été agréables; quoique vous les fissiez courtes, en
supposant que nous recevions un compte plus ample de la Politique
Européenne de la part de nos Amis à Paris. Nous observons avec
grand plaisir, que les Etats d’Hollande découvrent un courage
bienséant dans la conduite de leur Commerce, en accordant des
Convois en conséquence de l’insolent procédé de leurs voisins
Britanniques. La conduite magnanime de S.M.T.C. doit avoir une
grande influence sur toutes les nations autour de lui. Nous ne
doutons pas de vos félicitations cordiales pour le succès de notre
cause, laquelle vous avez de si bonne heure et si chaudement
épousée, et que vous avez aidée avec tant de jugement et de
résolution. Nous Ecrirons particulierement à nos Messieurs à
Paris, touchant les Injures que vous avez reçues de nos ennemis;
et nous les instruirons pour avoir l’attention la plus rigoureuse
aux engagemens que nous avons contractés avec vous au commencement
de notre correspondance. Nous devons vous renvoyer aux Imprimés
ci-joints, et à nos Commissionaires; quant à l’état général de nos
affaires. Nous remarquerons seulement ici, que nous avons été
poussés dans nos procédés du 22 Avril, entierement par cet esprit
uniforme que nous avons toujours soutenu depuis notre Déclaration
du 4e. Juillet 1776; n’étant pas alors informés de l’état
favorable de notre cause en France; parce qu’une fatalité peu
commune avoit accompagné les Lettres de nos amis, pendant près
d’une année entiere, avant l’arrivée de leur important paquet
actuel.
| /:signé./ | Richd. Henry Lee. |
En 1780, le 24 Mars, Mr. Robert Morris m’écrivit une Lettre,
dont voici ce qu’il est à propos d’extraire.
M, La votre du 7e. Janvr. de l’année passée fut longtemps à son
passage, et, je suis faché de dire, a été trop longtemps entre mes
mains sans réponse: ce que vous devez attribuer entierement à la
multitude et à la variété d’occupations, qui se sont emparées de
tout mon temps. Si j’avois écouté les dictées de ce respect et de
cette estime, que d’abord le Dr. Franklin, et puis votre constant
attachement aux intérèts de ce pays, m’ont inspiré pour vous, vous
auriez pu avoir immédiatement de mes nouvelles. Mais des hommes
embarrassés d’autant d’affaires que je le suis, ne sauroient
suivre leurs inclinations, et doivent se soumettre à ce qui
demande le plus pressamment leur attention.
Comme je conserve mes liaisons avec les Membres actuels du
Congrès, vous pouvez être assuré que j’aurai soin avec joie de vos
intérêts, toutes les fois que je le pourrai. Car je sens la force
de vos Observations à ce sujet. etc. etc.
à Mr. Dumas.
Le 10 Juillet 1780, Mr. James Lovell me fit le même honneur.
Je ne sais, me dit-il, comment exprimer tout l’égard que je sens
pour vous, sans paroître le faire ou sur de legers fondemens, ou
avec négligence, pour avoir différé si longtemps. J’ai été
constamment en Congrès, sans visiter une seule fois ma chere
famille à Boston, depuis Janvier 1777; et depuis May de la dite
année j’ai été Membre du Committé des affaires étrangeres. Par
conséquent je suis bien informé de vos sentimens vraiment
républicains, de votre affection particuliere pour ces Etats, et
de votre Industrie en leur Service: car la plupart de vos
nombreuses Lettres, jusqu’en Décembre, 30e., 1779, nous sont
parvenues. Je vous écrirai encore, et dans peu, par un homme
respectable de notre Assemblée (Mr. H. Laurens, pris par les
Anglois), et je mettrai tout en oeuvre, pour le rendre porteur de
ce que vous avez si justement sollicité, comme premier et fidele
correspondant de notre Committé; de la part duquel committé vous
aurez probablement des Lettres régulieres officielles, sous un
nouvel arrangement, etc. etc.
à Mr. Dumas.
Le 2 Octobre 1780, Mr. Franklin m’écrivit de Passy ce qui suit.
J’apprends de Mr. Searle, Membre du Congrès, que vous êtes
extrêmement bien avec le Committé, et avec le Congrès en général.
Je suis faché d’appercevoir quelques marques d’inquietude et
d’appréhension dans vos Lettres. Quant à la continuation de ce
dont vous jouissez, ou de quelque chose qui vaille autant au
service du Congrès, je pense que vous pouvez être fort tranquille
là-dessus. Il y a plus d’apparence que vos appointemens soient
augmentés, que diminués; quoiqu’il ne m’appartienne pas de rien
promettre. etc. etc.
à Mr. Dumas
Je puis aisément faire voir la part intime que j’ai eue à
l’admission de Mr. Adams comme Ministre Plénipotentaire, par les
nombreuses Lettres que nous nous sommes écrites. Mais je n’ai
besoin, pour mon but présent, que d’extraire ici la sienne
d’Amsterdam du 2e. May 1782. Voici la maniere énergique et
positive dont il s’exprime.
J’espere que vous êtes en possession de l’Hôtel à la Haie; et
mon avis est que vous y demeuriez. Mon opinion, soumise au
Congrès, est, que c’est l’Intérêt et le Devoir des Etats-Unis, de
vous envoyer une Commission pour être Secretaire de cette
Légation, et Chargé d’Affaires, avec un Salaire de cinq cents
Livres Sterlings par an, durant le temps qu’il y auroit un
Ministre ici; et à raison de mille Livres Sterlings par an, quand
il n’y en auroit point. Et vous avez mon consentement pour
transmettre cette opinion au Congrès, en lui envoyant un Extrait
de cette Lettre, ou autrement, par autant de voies qu’il vous
plaira. J’écrirai la même chose moi-même. J’en écrivis autant, il
y a plus d’un an. Mais je ne sais si la Lettre a été reçue. Car
nombre de mes Lettres ont été jettées en mer, et plusieurs prises
à Mr. Dumas.
En conséquence, je fis parvenir l’Extrait ci-dessus à Mr.
Livingston, Secretaire des Etats unis pour les Affaires
étrangeres, qui me répondit ce qui suit de Philadelphie, en date
du 12 Septembre 1782.
Quant à vos desirs pour votre bien être et avancement, j’ai déjà
fait mon rapport là-dessus; mais je ne saurois encore hasarder de
prédire quelle sera l’issue. Je sais que le Congrès est fort
sensible à votre assiduité et attachement; et si quelque chose les
empeche de les récompenser comme ils voudroient, ce sera l’état
présent de leurs finances, qui requiert la plus rigide économie.
etc. etc.
/:signé:/ Rob. R. Livingston
à Mr. Dumas
Enfin Mr. Franklin, de son côté, me fit écrire, étant lui-même
incommodé, par son petit-fils, ce qui suit, de Passy le 12e.
Septembre 1782.
Pour votre satisfaction, Monsieur, et pour preuve de la haute
idée que mon grand-pere a de vos mérites, je vous envoie ici un
Extrait, d’une de ses dernieres Lettres à notre Secretaire pour
les Affaires étrangeres où il s’agit de vous. Que vous puissiez
bientôt en expérimenter l’effet, est le voeu sincere de etc.
à Mr. Dumas.
Extrait d’une Lettre de Mr. B. Franklin à l’honble. Rob. R.
Livingston, datée de Passy le 25 Juin 1785.
J’ai fait l’addition que vous desirez au Chiffre; quoique je
préfere le vieux Chiffre de Dumas, peut-être parce que j’y suis
plus accoutumé. Je joins ici plusieurs Lettres de cet ancien et
digne serviteur de notre pays. Je dois, d’après une longue
expérience de son zele et de son utilité, demander la permission
de le recommander chaudement à la consideration du Congrès quant à
ses appointemens, qui n’ont jamais été égaux à ses mérites.
Mr. Adams m’écrit la bonne nouvelle, qu’il ne sera pas plus
longtemps obligé de tirer sur moi pour son salaire. Je suppose
qu’il sera à propos de le charger de payer aussi le salaire qui
sera alloué à Mr. Dumas.
/:Attesté et signé/ Wm. Franklin.
J’allois borner ici mes Extraits, lorsque la Lettre suivante de
Mr. H. Laurens me tombant sous les mains, m’a fait succomber à la
tentation d’ajouter son témoignage, aussi touchant que
respectable, aux autres, que je lui avois montrés quand il a passé
ici. Après les avoir lus, il s’écria d’abondance de coeur, You
have been slighted, My Dear! (On vous a negligé, mon cher!) Et sur
ce que je lui témoignai le regret que me causoit la résolution où
je le voyois de s’en retourner en Amérique, il me dit
obligeamment, qu’il étoit de mes intérêts qu’il y retournât.
Quelque temps après je lui écrivis sur autre chose, et j’ajoutai,
que l’homme négligé se recommandoit à son bon souvenir quand il
seroit de retour en Amérique. Il ne se souvint pas de ce qu’il
m’avoit dit, et me répondit ce qui suit.
Paris 9e. Janv. 1785
J’ai été trop longtemps en faute, mon cher ami, à l’égard de
votre faveur du 26 Nov. Mais si vous saviez les empechemens d’un
esprit affligé, et d’un corps affoibli et infirme, qui m’ont
constamment accompagné, vous auriez pitié de moi et excuseriez ce
délai: Je sai que vous le ferez: votre ame est tendre et
généreuse. C’est avec peine que j’écris la présente; et je crois
que je ne l’eusse pas fait, si ces mots l’homme négligé ne m’avoit
roulé continuellement dans l’esprit et me voilà sur le point de
quitter Paris pour quelque temps, et de retourner à Bath, dans
l’espérance d’y recouvrer encore une fois l’usage de mes jambes.
Dites-moi, mon cher ami, qui vous néglige? et dites-[le-]moi,
comme vous le diriez à un frere. S’il est en mon pouvoir de vous
soulager, de vous assister, tout ce qu’un pauvre homme comme moi
peut faire, sera fait librement. Je me sens moi-même votre
débiteur pour des civilités personnelles mais plus encore pour
votre amitié pour mon pays, laquelle, à mon avis consititue tous
les Américains des Etats-Unis vos débiteurs. Dieu préserve des
hommes, secourus dans leur détresses et aidés pour en sortir,
d’oubli ingratement ceux qui ont été leurs amis dans leurs peines.
etc. etc.
à Mr. Dumas
Touché, comme je devois l’être, d’une telle Lettre, je lui en
témoignai en réponse ma juste reconnoissance; et après lui avoir
rappellé et expliqué l’expression qui lui inquietoit l’esprit, je
lui ouvris mon coeur, comme j’aurois fait à un frere, ainsi qu’il
me l’ordonnoit, en ces termes.
Encouragé, Monsieur, par vos obligeants commandemens, de vous
dire, comme à un frere, ce que je voudrois être fait pour me
soulager et assister, je dois vous avouer librement, qu’après
avoir sacrifié et perdu une partie si considérable de ma vie, de
mes peines et de mon travail, de la fortune de ma pauvre famille,
pour avoir l’Amérique reconnue et honorée par ce pays aussi bien
que par la France, exposé ici à la haine, aux sarcasmes, aux
prophéties malignes, aux méchancetés des nombreux ennemis de la
cause, qui voudroient me voir méprisé, abandonné, misérable,
jusque dans ma famille; mon coeur, et celui de ma pauvre moitié,
est presque brisé, de voir le Congrès si froid, si indifférent, si
mal disposé à me reconnoître et protéger publiquement, comme je
l’ai reconnu et servi avec joie, lorsque j’y ai été solennellement
appellé, sans avoir jamais sollicité d’être employé ainsi. Dans la
circonstance où je me trouve, mon cher Monsieur, ou il y va de mon
honneur aussi bien que de ma fortune, personne ne peut ni ne doit
m’aider, si ce n’est le Congrès, en m’envoyant une Commission
selon l’opinion de Mr. Adams, dont je joins ici une copie, ainsi
que de la seule réponse officielle que j’aie jusqu’ici reçue
là-dessus de ce coté-là. C’est les termes seuls de cette
commission, qui ne sont nullement extravagants, ni supérieurs à
mes services, qui peuvent sauver mon honneur et ma famille.
Jusque-là ma situation ne peut qu’être extrêmement précaire et
mortifiante, puisque je dois continuellement vivre avec la triste
attente, d’être enfin tout-à-fait oublié, peut-être mis à la porte
par quelque nouveau Ministre envoyé ici, avec aussi peu de
scrupule qu’en Nouvelle Zélande on mange un homme, ou ailleurs un
poulet, et alors moqué et montré au doigt ici comme un fou; sans
autre consolation pour moi, que celle d’avoir fait ce que je
ferois encore; et sans avoir à me reprocher que d’avoir entretenu,
cheri la pensée, que le caractere moral de tous les grands agents
de cette révolution tenoit de la générosité du votre, et j’ose le
dire, de celui que je tâche constamment de perfectionner en
moi-même.
Une personne peu au fait de mon cas, et des usages des nations,
m’objecteroit peut-être, que je suis étranger. Je puis répondre à
cela, que je ne le suis point; que c’est de la part du
Congrès-même que je fus invité et engagé il y a tant d’années à
son service; qu’en acceptant ce service je lui prêtai serment de
fidélité dans ma premiere Lettre; et que, dès que j’ai pu, j’ai
renouvellé et prêté ce serment d’Allégeance formellement, ainsi
que je puis le prouver par le certificat suivant.
Amsterdam 16 Décembre 1780.
Charles Guillaume Frederic Dumas a paru en personne devant nous,
et a prêté le serment d’Allegeance aux Etats-Unis d’Amérique, sur
les Saints Evangelistes du Dieu Tout puissant.
| /:signé:/ | John Adams, Ministre plenipo- |
En 1784, le 25 Juin, à la requisition de Mr. Bingham qui étoit à
Amsterdam, je lui envoyai copie de ce Mémoire, et lui écrivis la
Lettre qui suit.
“Le Mémoire ci joint, Monsieur, n’est absolument entre les mains
de personne, que de mon intime ami Mr. Van Berkel, à qui je le
confiai quand il partit pour Philadelphie, sous condition qu’il
n’en laisseroit pas tirer de copie, et qu’il ne le feroit voir
qu’au President du Congrès, à Mr. Robt. Morris, et à quelques
autres, confidentiellement, selon qu’il le jugeroit prudent.
Jugez, Monsieur, vous-même, de la sensation qu’une telle piece
feroit parmi les amis et les ennemis des Etats-Unis, si elle étoit
connue et divulguée, même sans commentaire, qui se feroit assez de
soi-même par les Lecteurs de L’une et de l’autre espece.”
“Ce que j’ai dit dans ma réponse à Mr. Laurens, touchant la
nécessité où je pourrois être de devoir déloger de l’hôtel, se
trouve vérifié comme vous savez. [L’hôtel est vuide depuis plus
d’un an, et gardé par un Concierge Anglomane]. Heureusement j’ai
pu mettre une décence, et donner des couleurs à mon délogement,
favorables à la fois à mon honneur, et au crédit de L’Amérique.”
“Je m’etois prescrit, en vous écrivant tout ceci pour satisfaire
à vos desirs, de m’en tenir rigoureusement à un simple narré de
faits. Je ne saurois cependant m’empécher d’ajouter une réflexion,
qui se rapporte à un entretien que nous avons eu vous et moi. Je
vous avois observé, que j’étois le seul des Serviteurs du Congrès
dont on n’avoit pas eu soin. Vous me répondites, qu’il y en avoit
nombre dans mon cas en Amérique, et que le Congrès aura soin de
tous. Remarquez, M, que ce n’est pas des serviteurs du Congrès en
Amérique, mais de ceux en Europe que j’entendois parler, et
auxquels je dois être comparé. Les premiers ont des suretés, des
amis, des parens, des recours et des ressources dans leur pays, où
je n’ai rien de tout cela. Les seconds ont tous été, et sont
encore, très décemment pourvus et caractérisés; et il leur reste
des expectatives à tous égards riantes et bien fondées à leur
retour chez eux. Mais moi, qui certainement n’ai pas été le moins
patient, le moins discret, le moins délicat, le moins attentif et
le moins actif, ni, par conséquent, le moins heureux dans mes
opérations et le moins utile, je suis jusqu’à ce jour mal avoué,
mal caractérisé et mal pourvu”
“Vous voyez, M, par la maniere dont je vous ouvre mon coeur, que
je prends dans toute sa force (et ce seroit vous faire injure que
de le prendre autrement) le dernier mot que vous m’avez dit
lorsque nous nous sommes dit adieu, que vous feriez votre affaire
de la mienne. J’y compte aussi. Je vous prie seulement d’observer
que mon cas presse par bien des raisons, tant de mon côté que de
celui du Congrès, qui, s’il n’a rien résolu encore quant à
l’établissement de ses affaires étrangeres, le fera sans doute
l’Automne prochain, et que, si je suis encore oublié, je le serai
pour toujours. Permettez-moi donc d’espérer que vous écrirez, en
attendant que vous soyiez à même de parler.”
Depuis ce temps, j’ai su que le Congrès avoit nommé
successivement Mr. Livingston, Gouverneur de la Nouvelle Jersey,
et, sur son refus, Mr. Rutledge, ancien Gouverneur de la
Sud-Caroline, pour succéder ici à Mr. Adams, sans avoir daigné
prendre une résolution à mon sujet, comme il auroit dû le faire ad
interim depuis bien des années, selon la proposition de Mr. Adams,
puisque je remplis toujours, et la plupart du temps seul, les
fonctions essentielles de leur Ministere ici. On dit seulement
quelque fois à Mr. Van Berckel, que je ne serai pas oublié, et que
je n’aurai pas lieu de me plaindre.
Mr. Bingham vient de me lire une Lettre qu’il a écrite en
Septembre dernier au Secretaire des Etats-Unis pour les Affaires
étrangeres, Mr. Jn. Jay, ensuite d’un entretien qu’il a eu avec
Mr. De Gyselaar, qui lui a dit nettement, que l’idée qu’on avoit
et qu’on auroit ici du Congrès, et la maniere dont on se
communiqueroit à son Ministre, tenoit aux procédés qu’on voyoit et
qu’on verroit avoir pour moi.
J’avois, il y a 10. ans, un sors de 3000 florins par an. Je n’en
ai pas 2500 ronds des Etats-Unis depuis ce temps. Malgré la
réduction faite dans mon ménage et domestique, je dépense au-delà
de 500 florins de plus que cela. On m’a d’ailleurs fait perdre, en
haîne du parti que j’avois embrassé, une somme d’environ 6000
florins. Je suis donc actuellement et réellement en perte
jusqu’ici de 15,000 florins pour l’amour des Etats-Unis.
Je terminerai ce long Mémoire par deux Lettres encore. La
premiere est ma réponse à une de Mr. Robt. Morris, où il me fait
part de sa retraite des affaires publiques: l’autre est une Lettre
d’adieu de Mr. Franklin. Et en attendant que ce Mémoire, destiné à
passer sous les yeux les plus respectables, produise l’effet qu’il
n’a pu avoir jusqu’à cette heure, je continue, et continuerai tant
que je pourrai, mon dévouement au service, non seulement des
Etats-Unis, mais aussi de leurs bons Alliés.
A Son Excellence Mr. Robt. Morris dernierement Ministre des
finances des Etats unis, à Philadelphie.
La Haie 1er. May 1785.
J’ai reçu, Monsieur, avec gratitude votre faveur du 30e. 7bre.
1784, et souhaite de tout mon coeur, que vous jouissez dans votre
retraite de tout emploi public, du repos et de la douceur de la
bénie liberté et égalité, acquise par tant de courage, et de
vigueur. La réponse favorable, Monsieur, à mes représentations,
que vous espériez obligeamment de pouvoir m’acheminer, n’est pas
encore arrivée. Et je crains, que si jamais elle arrive elle ne me
trouve dans la situation de l’ancien philosophe mourant, qui dit à
ses amis lorsqu’ils vinrent pour suppléer à ses besoins, qu’il est
trop tard de verser de l’huile dans la Lampe, quand on en a laissé
éteindre la meche. L’organe moral, Monsieur, de maints corps
moraux, a souvent besoin d’être reveillé par celui de quelque
digne individu. Permettez-moi d’attendre toujours ce bon office de
votre présent loisir, autant et plus même, que lorsqu’une
multitude de soins publics devoient s’emparer de toute votre
attention, etc. etc.
Passy 5 Juillet 1785
J’ai reçu, M, votre obligeante Lettre du 12e. May. Ce que vous
avez oui dire, du Congé que j’ai obtenu de retourner chez moi, est
vrai. Je suis maintenant sur le point de partir pour Philadelphie,
où ce sera un plaisir pour moi de pouvoir vous être de quelque
utilité. Car je suis extrêmement sensible à vos longs, fideles et
importants services, rendus à la cause Américaine; et à ce qu’ils
n’ont pas été convenablement récompensés jusqu’à cette heure. Avec
grande estime, et mes voeux sinceres pour votre santé et
prospérité, je reste, mon cher ami, votre très affectionné
à Mr. Dumas
La Haie 6e. Octobre 1785
Le précédent Mémoire a été fait, et remis confidemment à Son
Excellence Mr. le Marquis de Verac, Ambassadeur de France, pour en
faire l’usage qu’Il jugera à propos selon les gratieuses
dispositions que Son Exce. a bien voulu me témoigner.
Notation: 6 8bre 1785
642544 = 043-u473.html