Nous sommes dans le siecle des Emprunts Monsieur et vous voyez quils ne reussisent pas mal soit en france soit en angleterre, cela m’a fait penser quil serait peut etre possible d’en faire un pour les états-unis de l’amerique et comme ils n’ont pas encore toutte la Stabilité quils acquereront par la suitte il conviendrait quil fut composé de maniere que chaque preteur risque peu pour avoir baucoup, en un mot qu’on regardat l’Interet qu’on y prendrait comme un argent exposé dans un jeu qui rend de très gros Interets. Il n’y a qu’une Loterie en rentes viageres qui qui puisse presenter un tel appat. J’en ai une toutte disposée de 12 millions composée de 100/m billets à 120 l.t.. Pour ces 120 l.t. on aura une billet qui parcoura 20 chances differentes depuis 5% D’Interets jusqua un Lot de 500 mille livres de rentes, inextenxible pendant un temps et accroissable pour un autre. Il n’y a comme vous voyés Monsieur aucun billet blanc, il sagit du plus, ou du moins d’Interet; chaque billet sera tiré 20 fois de la roüe de fortune mais comme ces tirages seraient long par la voye ordinaire, ils seront executtés par un moyen très expeditif puisque le tirage de 20 fois 100 mille billets s’operera dans une Seule Seance dune heure au plus.
Cet Emprunt ne peut pas etre ouvert en france du moins publiquement il pourrait croiser les vües du Ministre des finances qui dailleurs est bien aise de reserver au Roy seul le privilege des Loteries ou impositions volontaires mais on pourait l’ouvrir à Genes, et meme y executter le tirage, car quoique la hollande convinsse mieux, et quel soit un état libre, il est possible que si elle venait a faire un accomodement avec L’angleterre, (ce que je ne crois pas) elle se refusat à cette tolerance. On aura des agens surs, dans touttes les principales places de l’Europe pour la distribution des billets. On pourait pour faciliter cet Emprunt recevoir en payement quelques parties des papiers dûs par le Congrès. Ses creanciers ne manqueront pas non plus d’y prendre part, et de le soutenir ne fusse que pour rendre leur creance plus sure. Les Etats unis peuvent presenter l’hipoteque des terres, et lengagement du Congres representant la Nation, en promettant que les arrerages seront payés en Europe sans aucuns frais dans la ville où l’on aura pris les billets; et quelque soit l’evenement de la guerre ils peuvent toujours payer un Emprunt dont ils n’ont que les rentes [à] acquitter, et qui leur sera si peu onereux quil ne leur coutera que 8½% l’une dans lautre par an ce qui vous paraitra une paradoxe, mais que joffre de vous demontrer quand il vous plaira.
Quel est le joueur en Europe qui ne voudra pas courir le risque dune fortune considerable pour 120 l.t. une fois donné dont le plus bas interet a la derniere chance donne plus de 6½% et pretent des lots immenses dans touttes les Epoques. Il y en a 1 de 500,000 l.t. de rentes 1 de 240/m l.t., 1 de 200/m 1 de ? 1 de 140/m, 1 de 120,000, 1 de 100/m 10 de 25,000 l.t. etc. etc. etc.
Si vous trouvez Monsieur que 12 millions soyent trop peu de chose, on peut doubler la dose en faisant les billets de 240 l.t. ou en augmentant le nombre jusque 200,000, mais peut etre sera-t’il mieux de commencer par 12 millions, et sil reussit bien en faire un autre de pareille somme dans un an.
Enfin je propose et vous disposerès Monsieur vous of[frant?] le developpement du Plan de Loterie, et meme [de] me rendre en Amerique sil le faut par les premiers navires qui partiront.
Quoique jaye lhonneur de vous ecrire de Turin où je suis venu pour appliquer cette meme loterie a une entreprise qui ne peut pas avoir lieu, je suis domicilié à Paris, je suis attaché a la france par gout et par le sang. Si vous me faittes lhonneur de me repondre vous pouvès faire remettre votre lettre a ma femme rüe garanciere près le Luxembourg en m’adressant un Duplicata poste restante a Turin.
Jai lhonneur detre tres respectueusement Monsieur Votre très humble et tres obeissant serviteur