Notre Sieur Plombard a eu l’honneur de vous ecrire le 20 du Janvier der. pour vous prier de remettre une incluse a votre Cousin Alexis Louis Cy devant notre Associé dans notre Maison de Charles-Town.—Il vous faisoit part, Monsieur, des Sentimens d’attachement & d’amitié qui nous lient depuis bien long tems avec Mr. Votre Oncle David Chollet, amitié que nous serions bien aise de perpetuer entre vous et nous, du moins de nôtre Coté nous Saisisons toutes les Occasions pour vous prouver que tout ce qui porte le Nom de Chollet ne peut vous être indifferent.—Par un Brigantin arrivé hier de St. Thomas, nous apprenons la Confirmation de votre isle par l’Amiral Rodney, et du mauvais traitement que tout les Habitans eprouvent, et nous inquietent sur votre Compte. Celui de Mr. et Mde. Bize & Vrage, ne peuvent-être plus grandes. Nous ne serons point tranquil jusqu’a ce que nous aprenions quel est votre Sort, tel qui soit nous vous prions d’être persuadé que dans tous les Cas, nous seront charmés de vous rendre nos services et de vous prouver notre Attachement.
Le 20. fever. der. des fregattes etantes en Croisiere prirent sous le Canon du fort a l’entrée de ce Port un Navire nommé le Diamant. Capne. Hudson, aïant abord 205 Negres, et une Cargaison de Marchandises Seches, sortant de St. Eustache le 3. du même Mois, et destiné pour ce Port. Le lendemain 21e. nous fumes informés par un Pilot du Port, qu’un Mr. Anglois de Nation, dont nous ne nous resouvenons pas le Nom, etoit détenu abord d’une des fregattes comme prisonnier (Ce Mr. etoit Subrecargue sur le Nre. le Diamant) demandoit a nous parler.—Nous nous rendimes sans perdre de tems a bord accompagné du Capne. de la ditte fregatte, ou étant, ce Subrecargue nous dit qu’il etoit porteur d’une lettre de Mr. Bize pour nous, et que vous etiés un des Propriétaires du dit Nre. Le Diamant, que vous nous aviés consigné, ainsy que toute la Cargaison, et que la Lettre a nous ecrite par Mr. Bize lui avoit été enlevée, qu’elle se trouvoit entre les Mains du Capitaine de la fregatte Preneur, a qui nous la redemandames sur le champ—il y consentit, et après en avoir pris lecture, nous fumes persuadés de la Verité du fait.—Au même instant nous fimes des Representations au Capne. Preneur que le Nre. le Diamant ne pouvoient être de bonne Prise, que d’ailleiurs il etoit Porteur d’un Ordre de Monsr. de Sartine, Ministre, pour l’introduction des dits Negres en ce Port. Le Capitaine Preneur repondit que cette Affaire étoit entre les Mains du Juge de l’amirauté et que lui Seul decideroit la Question.—Le Subrecargue pour donner au Capne. Preneur plus de Certitude qu’il etoit destiné pour ce Port, ou il se rendoit lorsqu’il fut arrêté sous le Canon du Fort, tire alors de sa Poche les Ordres qu’il avoit, auprès de vous, Monsieur, pour venir au Cap: nous en primes lecture, ainsy que le Capitaine Preneur, et nous fumes convaincu qu’a cet egard tout etoit dans la plus exact Verité.—Cependant nous observames dans Ses Ordres que ce Nre. etoit premierement addressé a M.M. Cambon & Oré Negts. de cette Ville, avec qui on ordonnoit a ce Subrecargue de faire son marché, et de traiter avec eux pour la Commission—qu’a deffaut d’arrangement il s’addreseroit a nous pour un pareil traité, et que s’il ne pouvoit y reussir, il s’addresseroit a la Maison de M.M. F[illegible] & Cie.
D’après la Lecture de ses Ordre nous representames au Subrecargue du Nre. Le Diamant qu’il auroit du appeller premierement M.M. Cambon & Oré.—puisqu’ils etoient premiers en date, mais il nous repondit “Qu’a la Verite il devoit s’addresser a Mes dits Sieurs Cambon & Oré, mais que par Ordre Verbal et très particuliérement recommandé, il lui avoit prescrit que dans le cas de quelque Evenemens, et qu’on ne pouvoit prévoir, Vous Monsieur & Mr Bize les aviez recommendé d’avoir recours à nous, que c’etoit la raison qu’il nous avoit fait prier de nous rendre abord de la fregatte, ou il etoit et est encore détenu Prisonnier.” Sur cette declaration, Monsieur, car vous savéz que lorsqu’il est question de vous donner des Preuves de notre Attachement, nous n’en laissons pas echapper l’occasion, encore que nous fimes des representations au Capne. Preneur, et nous lui demandames la delivrance non Seulement de l’ordre de Mr. de Sartine, mais encore des votres au Subrecargue, et de la Lettre a nous adressé par Mr. Bize, a quoy il se refusa—ces Pièces nous ont été soustrait, et n’ont point paru dans la procedure.
Ne pouvant obtenir raison du Capne. Preneur, nous nous rendimes sur le Champ, chez Le Juge, et Le Lieutenant du Juge de notre Amirauté, à qui nous fimes part de tout ce qui venoit de se passer, et que nous voulumes interesser a la non-condamnation de ce Navire dont vous etiés les Propriétaires.—Ils nous repondirent— “Que quelque desire qu’ils avoient de nous obliger, ils ne pouroient juger que sur les Pieces qu’on leur representoit, que le Nre. Le Diamant ayant été trouvé et pris a l’entrée du Port, avec un Passeport et sous Pavillon Anglois, qu’en outre tous les Papiers qu’on avoit trouvé abord prouvoient qu’il etoit lettre de Marque, et expedié de St. Cristophe pour la Jamaique tout en croisant sur les ennemies de la grande Bretagne et qu’en raison de tout ce que dessus, ils ne pourroient s’empécher de le condamner de bonne Prise.”
En Effet ce Navire a été condamné ces jours derniers, vendu aujourdhuy, et les Negres hier et avant hier. Lundy et Mardy prochain les Marchandises Seches le Seront.—Nous demandons, comme nous l’avons desja fait l’elargissement du Subrecargue qui est toujours détenu prisonnier abord d’une des fregattes. Nous esperons y réussir—dès qu’il sera libre, nous lui rendrons tous les Services qui dependra de nous.—Ce Subrecargue nous a dit qu’il venoit après lui une Goelette avec des Négres, et une Cargaison de Marchandises Séches, laquelle vous nous addressés directement, dans la crainte que ne se rencontre pas ici. Si elle arrive et que nous aïons des Pouvoirs de votre part, nous verrons s’il convient de reclamer contre la Condamnation du Navire le Diamant. Nous n’osons nous en flater. Nous sommes bien fachés, Monsieur, de cet Evenement, surtout sy vous y prenez interets au point d’alterer votre fortune; quoi qu’il en soit, nous vous le repetons, nous nous estimerons toujours heureux de vous prouver notre Amitié et notre Attachement. Recevez l’assurance de celui avec le quel, Nous avons l’honneur d’être, Monsieur, Votre trés humble et trés Obeissants Serviteurs