Vous avez bien raison mon aimable ami j’aime mieux un mot que rien. Le votre du mois d’octobre m’a fait le plus grand plaisir. Il m’apprend que vous vous portez bien. Ce seul article me console de toutes mes inquietudes. Je vais suivre votre éxemple, vous n’aurez plus qu’un mot de moi et comme le votre, il vous dira que je me porte parfaîtement bien, attendant toujours le térible moment, tout annonce qu’il sera plus long et plus peinible que le dernier. Mais il y a long-tems que je suis résignée à tout événement.
Dans ma premiere lettre je vous parlerai en grand détaille sur votre éspoir de retour en france, mais aujourd’hui cela m’est impossible je n’ai qu’une minute à moi. Il faut que je vous quitte. Md le B…m’a chargé de vous dire qu’elle vous aime toujours, que vous pensiez à elle, et qu’elle ne vous oublyra jamais. Je trouve cela tout simple. Comment vous oublyer? Jamais! jamais! Vous avez dans la petite blanchette, une bonne et tendre amie, son coeur vous sera attaché jusqu’a la mort. Je crois mon ami que votre amour propre doit être flaté de cet attachement il vient de ce que j’ai su vous apprécier. Adieu adieu mon aimable ami. Le vaisseau vous porte deux de mes lettres il me semble que c’est une fort jolie maniere de se conduire, si mes lettres vous font toujours plaisir, je me féliciterai alors de n’avoir pas eu deux cent cinquante lieux à faire. Tachez donc de n’etre plus si long tems abcent souvenez vous bien qu’un Vaisseau sans lettre de vous est un grand chagrin pour moi.