Vos grandes occupations devroient vous mettre à l’abris d’être incommodé par de pareilles lettres, mais la renomée de vos sentiments, et en même tems ceux de vos compatriotes si bien soutenus, par la bravoure, la Prudance, la Justice et la Pollitique, étant parvenûs jusqu’ici, et sachant que la vraie générosité, et grandeur d’ame ne se trouvent que dans la Nation, dont vous êtes le representant; j’ai crû pouvoir hazarder de vous adresser ces lignes, sans encourir le malheur de vous déplaire, et de pouvoir vous exposer les motifs qui m’engagent à cette démarche sans avoir l’honneur d’etre connû de vous.
Je suis d’une de ces familles réfugiée de France accause des persécutions contre la Religion Reformée, mais malheureus ancêtres, se sont établis en Dannemarc apprés que l’Edit de nantes fût levé, et étant expatrié il ont fait profession de porter les armes, et de servir dans differantes armées. J’ai suivi leurs exemples, et j’ai commencé à servir en Prusse, ou j’ai fait cinq campagnes dans la derniere guerre de Silésie, de puis l’année 1756 jusqu’en l’année 1761. Je fú ensuite rappellé en Dannemarc, lorsque l’Empereur Pierre troisieme, ménassoit ce Royaume d’une Guerre à cause dû Holstein. Sa Majesté Dannoise me confia le commendement en Chef de toutes ses trouppes légéres, à pieds et à chevals. La tranquilité étant survenue, je passé en Russie, ou je suis encore, sans en pouvoir sortir, áprés avoir servi cet Empire onze ans, et avoir fait toutes les campagnes en Pollogne depuis le commencement des conféderations occasionnée par l’élévement du Roi d’aujourd’hui au Trône, et, ai ensuite été depuis le commencement de la Guerre avec les Turcs jusqu’a la fin, et me suis trouvé à toutes les Battailles decisive, que la premiere armée â livrée aus infidêles, mais étant, étrangé, quoique Collonel de la Cavallerie, je me suis vû chiquanné, ce qui ma fait prendre mon Congé.
Je suis dans ma quarante et troisieme année, et je crois encore être capable de servir dans une armée en tent de guerre.
Il y a longtems que j’aspire au bonheur de vivre et de mourir dans un pais libre, ayant raison d’être dégouté des Etats Monarchiques et mon intention, est de passer en Amérique avecque toutes ma famille mais comme je suis incertains, si ce la se peut et si je puis me flatter, d’y-être, reçû, placé, et naturalisé. Je vous sûplie tres humblement Monsieur d’avoir la grace pour moi de m’honorer d’une réponce et de me faire savoir vos intentions, à mon égard et en cas que ce soit possible de me procurer les moyins dû voyage par Mons. Thamesz, Banquié Englois á Moscou ou par qui vous jugerais àpropos.
Mon fils ainé est en age de porter les armes et il les employeras de bon coeur, pour la défence et le mintient de la liberté et de la justice, et nous nous estimerons tous deux tres heureux, si nous trouvons lés occasions en versant notre sang, pour ce sujét, de vous donner à connoitre que nous ne sommes pas indignes de l’honneur que nous désirons, d’appartenir, aus Provinces unies, et indépendantes en Amérique.
J’ai l’honneur d’être avec la consideration la plus respectueuse, Monsieur, Vôtre tres humble et trés obeïsant serviteur