Je suis de retour, mon très cher monsieur, depuis vendredi dernier, et depuis ce moment il ne m’a pas été possible de vous parler du tendre attachement que je vous ai voué, encore moins de vous aller embrasser et présenter mon respectueux hommage à Mr. Franklin. Voudrés vous bien le lui faire agréer: j’ignore même quand je pourrai jouir de ce bonheur; car je ne peux me dispenser de m’aller montrer à Versailles, pour renouveller connoissance avec notre nouveau ministre.
Je suis arrivé chargé des amitiés les plus tendres et pour Mr. Franklin et pour vous de la part de notre bonne comtesse; elle vous embrasse l’une et l’autre du meilleur de son coeur; je l’ai laissée un peu souffrante; elle a un mal incurable, son extrême sensibilité.
Les dernieres nouvelles que j’ai eues de mon correspondant de la Haye sont du 28e Xbre, et alors on n’y savoit point encore la déclaration de guerre de la cour de Londres contre la république. Il craint toujours que les puissances du nord ne veuillent point l’admettre dans leur alliance; je ne dois pas tarder à avoir quelque chose de Lui. Du reste je ne sais presque rien; mais je vais réveiller mes correspondants. Si de votre coté vous avés quelques nouvelles, veuillés m’en faire part, vous savés que j’en fais bon usage.
Adieu, mon très cher monsieur, continués moi votre amitié et ne doutés jamais de celle avec laquelle je me ferai gloire d’être, votre très humble et très obéissant serviteur