J’ai reçû les deux lettres dont il vous a plû m’honorer le 21. fevrier dernier, toutes deux de même date.
Je suis sensible audela de toute expression, Monsieur, à tout ce que vous avés la bonté de me marquer de gracieux et d’obligeant; Je vous Suplie avec un profond respect de vouloir agréer l’homage de ma vive reconnoissance et de ma très humble gratitude, comme aussi celui réiteré de mon dévouement infini, et de la vénération dont je suis pènetré pour vôtre illustre personne. Je suis fort aise, Monsieur, que mon zéle et mes soins pour le bien des intérêts de vôtre Nation vous ayent èté agréables. Je suis seulement mortifié de n’avoir pû vous servir aussi utilement que je l’aurois desiré. Cependant mes démarches n’ont pas été tout a fait infructueuses. Le gouvernement Danois a fait payer toutes les dépenses faites ici pour vos gens, tant celles qui étoient à la charge des prises jusqu’à l’epoque de leur restitution, que celles qui ont été faites depuis pour l’entretien, et nourritures à Terre des équipages degradés, comme aussi pour fournitures de hardes et autres besoins. Ils n’ont assurement manqué de rien, et ont eu du Superflû—on a tout payé.
J’ai fait rembourser M. Danekert D’Krohn, qui s’etoit chargé de la commission, sous ma garantie, et qui en avoit fait les avances avec beaucoup de bonne volonté. Il est de nos amis et s’est montré fort zélé, et adroit à nôtre reconnoissance.
Je me propose, Monsieur, dentrer dans un plus grand détail avec vous par le courier prochain. Je me bornerai aujourdhui à vous annoncer Monsieur, le départ des dits équipages degradés de vos gens pour Dunkerque. On a frété un Bâtiment Danois nommé la fortune Capne. Mathieu Delange aux frais de sa Majté. Danoise. Il mettra à la voile jeudi matin si le vent est favorable. Independamment des provisions nécessaires mis à bord de ce Bâtiment, les Capitaines ont obtenu l’argent qu’ils désiroient pour conduite, ou pour se procurer quelques rafraichissemens en cas de relâche, ou autre évenement imprevu. Je n’ai qu’a me louer de la bonne et sage conduite de ces officiers, que je recommande, Monsieur, à votre protection.
Le gouvernement Danois ici M. Bager leur a fait beaucoup d’honnêtetés, et les a Traittés plusieurs fois Splandidement. Je lui en ai temoigné ma reconnoissance. Je ne doute nullement, Monsieur, que ces officiers ne vous en rende compte.
Voila donc cette malheureuse affaire terminée quant aux dèbours faits ici. Il ne reste qu’à Savoir maintenant quelle sera le dedommagement que vous obtiendré de la cour de Dannemarck. Je ne doute nullement qu’elle n’y soit disposée. J’apprendrai avec un vrai plaisir, Monsieur, que cette affaire aura eté arrangée et terminee à l’amiable, et à la satisfaction du Congrès.
J’ai l’honneur de vous informer, Monsieur, qu’il est entré en ce Port le 4. dernier passé un Bâtiment Marchant de vôtre Nation nommé le governor Johnson commandé par un Capne francois nommé Michel Baudre, venant de la Virginie chargé de Tabac. Je lui ai fait arborer le pavillon francois. Il jouira des mêmes avantages et prérogatives que les Bâtiments francois. Il a obtenû la permission de vendre sa cargaison, et il en prendra une autre de retour. J’ai rendu compte de mes opérations à cet égard à Mgr. de Sartine ministre de la marine et à M. le Baron de la Houze Ambassadeur du Roy à Copenhague, qui ma fait instruire des intentions du gouvernement Danois à cet égard.
J’ai procuré à ce dernier Bâtiment un bon commissionaire qui est toujours le même, dont je vous ai marqué la solidité et la probité, M. Danekert D’Krohn; Il travaillera sous mes auspices.
J’ai l’honneur dêtre avec les Sentimens les plus distingués et un très profond respect, Monsieur, Vôtre très humble et très obéissant serviteur