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J’ai Reçu avant hiér 6 Courant l’obligeante Lettre dont il a plu a V. Exce. de m’honorer en datte du 5 fevrier passé. Je ne Saurois, Monseigneur, vous marques assez vivement combien je suis pénétré de la confiance que vous daignez me témoigner, en me demandant la continuation de ma correspondance, pour ce qui peut conserner les intérêts, avec ce païs-ci, des Etats unis de l’Amérique septentrionale, auxquels je desire bien Sincérement pouvoir donner des preuves, non équivoques, de mon Zéle pour ce qui peut les interesser. En attendant que je puisse Saisir ces occasions, je ne puis que remercier très humblement V. Exce. de ce qui’il lui plait m’annoncer d’avance, que ce que je pris la liberté de lui Ecrire le 20 Novembre Sera accueilli par le Congré. Sous vos auspices, Mgr., je ne doute de rien, et Si j’ai le bonheur d’Etre utile au Congré, je n’en attribuerai le Succès qu’à V. Exce. à qui j’ose demander Sa protection.
Jusqu’à présent, Mgr., il ne m’appartenoit que de vous faire part de ce qui pouvoit se passer ici concernant la prise en question, faite au mois d’octobre dernier, par un Corsaire de S.M. l’Empereur de Maroc; mais à présent que vous me permettez d’entrer en relation avec vous, et de m’étendre Sur les points qui peuvent ménager une bonne harmonie, entre les Etats unis et le Maroc, je prendrai en priant V. Exce. d’insinuer au Congrés, qu’à cause du païs ou je me trouve, il Seroit dangéreux pour moi (S’entend Si mon nom paraissoit) de laisser transpirer dans les papiers publics plusieurs relations que je puis être dans le cas de donner, tant à présent qu’à l’avenir.
Touchant ce que V. Exce. dit qu’elle éspere que la Lettre qu’elle fait passee à M. harison en réponse à celle qui étoit inserée dans mon pli du 20 9bre. (écrite par un Renégat Allemand nommé Al-Kair Driss) dissipera le mécontentement de l’Empereur de Maroc. Je puis vous assurer, Mgr., que Si l’on vous a fait entendre que ce Monarque avoit du mécontentement contre les Etats unis, l’on a eu grand tort, car la maniere dont il a reçu et ordonné de traiter le Capitaine, et [l’]Equipage du Batiment pris par son Corsaire, n’annonce pas du mécontentement; mais simplement une maniere d’agir offensivement, non pour vouloir la guerre avec les Etats unis; mais Seulement pour que ceux-ci S’empressent de rechercher son amitié plutot; Voilà comme l’on doit interpreter ses démarches en Europe. Cependant comme Prince Mahométan, il n’est pas de Sa grandeur de faire connoître clairement Ses vices dans la politique qu’il observe vis àvis les Nations Chretienes; c’est pour quoi l’on Se trompe souvent quand on veut juger Sur les motifs qui le font agir. Ce Souverain est pleinement persuadé qu’il convient à toutes les puissances Chretiennes, qui font le Commerce maritime, et qui passent d’une mer à l’autre par le détroit de Gibraltar, d’etre en paix avec lui; aussi ne manque-t-il pas de tirer tout l’avantage qu’il lui est possible de l’amitié que les Européens maintiennent avec lui. Ce Prince fait également que les Cours d’Europe font des calculs, et mettent en balance si les frais qu’elles Seroient obligees de faire pour maintenir des frégates et Corsaires sur Ses Côtes pour la Sureté de leurs Bâtimens Marchands, surpassent les frais et la valeur des présents qu’on est dans l’usage de lui faire; de cette connoissance qu’il [a?] de la politique Européenne, il fait de son coté [les?] calculs qui Sont toujours justes pour Ses intérêts. Il n’ignore pas que les Etats unis font un Commerce maritime qui S’accroitra de jour en jour, et qu’avant l’heureuse Epoque ou ils leverent l’Etendart de la Liberté contre leurs opresseurs, ils fréquentoient les Port[s] de Tetouan, Tanger et Larache pour y charger des mules dont on fesoit un assez grand Commerce dans l’Amérique septentrionale. Il Se flatte donc qu’aujourd’hui, devenus Libres, et formant une puissance respectable, il est de leur intéret de Faire ce Commerce directement, et non pas recevoir de Seconde main ces Mules qui leur reviendroient naturelement plus cheres. Voilà, Monsgr., les Spéculations, que je Supose, (par connoissance de cause) que fait l’Empereur de Maroc. Je n’ai pas besoin de m’étendre d’avantage Sur les connoissances que je pourois donner de la politique de ce Monarque. Ce que je viens de dire Suffit pou[r] faire connoitre qu’il ne desire rien tant que de voir rechercher Son amitié directement et promptement par les Etats unis, de qui il recevroit avec plaisir une Ambassade pour faire un traité; d’ou il S’ensuivroit l’établissement et la résidence d’un agent ou Consul des Etats unis, dans un des Ports de cet Empire. Cependant Si Mgrs. les représentants des Etats unis tardent d’Ecrire une Lettre obligeante à S.M. Impe. Marocaine, il ne Seroit pas Surprenant que ce Souverain donnat des ordres pour que Ses Corsaires commissent de nouvelles hostilités contre les Bâtimens Américains. C’est pourquoi Si les Etats unis Sont disposés à être en paix avec ce Monarque, il convient qu’ils lui écrivent promptement. Par ce moyen les dits Etats unis pourroient differer encore quelque tems avant d’Envoyer une Ambassade; mais il faudroit que dès à présent ils continuassent par voie d’office (en faisant passer des Lettres de créance pour être reconnu par le Souverain du païs), un Sujet dans cet Empire, à qui l’on donneroit une autorité éxpresse, Soit en qualité d’agent, ou de Consul, pour S’entendre avec le souverain des affaires qui concerneroient les Etats unis avec la Cour de Maroc.
Voilà, Mgr. ce qu’il m’a paru convenable de vous éxposer. Si par la prochaine réponse, dont j’éspere être honoré de V. Exce. je connois des dispositions pacifiques de la part des Etats unis, àlors je pouroi[s] entrer dans quelques détails qui Serviront de gouverner au Congrés pour pouvoir faire une paix la moins onéreuse possible avec le Monarque affricain.
En attendant, il me Semble important de faire remarquer à V. Exce. que les Lettres qu’elle aura reçue[s] et poura recevoir de la Cour de Maroc en Langue Europeenne, doivent avoir une marque incontestable par laquelle on connoit Si elles sont Ecrites par ordres du souverain, ou composées à plaisir par les sujets qui les envoient. Si c’est par ordre du souverain elles doivent avoir au haut, mis de Sa propre main, son chifre, qui consiste dans l’année de l’Ere de leur Prophete, actuellement 1199. Si elles ne portent pas cette marque, et qu’elles disent être écrite par ordre de l’Empereur, ils est sur qu’elles Sont supposées. Comme M. harrison me prévient qu’il a fait passer à V. Exce. le contenu de plusieurs lettres que je lui ai Ecrites postérieurement à l’Epoque du 20 9bre. j’évite de marquer ici la continuation de sort qu’ont éprouvé le Capitaine James Ervin et Son Equipage. J’ai été et je Suis encore sensiblement touché des peines et chagrins que ressentent ces aimables Captifs. Cependant, ils ont encore du bonheur, dans leur malheur, en ce qu’ils ne Sont point maltraités. Ainsi que l’Empereur disposa qu’ils allassent à Mogador, j’aurois bien desiré qu’il les eut envoyé dans cette Ville de Salé, pour être plus a portér de les assister; Ils l’auroient bien desiré, eux mêmes par le contentement qu’ils témoignerent de me voir à leur passage ici. Néanmoins, quand bien même V. Exce. ne me feroit pas la grace de me recommander la continuation de mes petits services, vis àvis d’eux, je me Serois toujours fait un plaisir et un devoir d’humanité ainsi que je l’ai fait, et je le ferai, de leur offrir et donner sincérement les petits Secours dont ils peuvent avoir besoin. Je continue toujours ma correspondance avec le Capitaine qui Se trouve encore à Mogador avec tout son Equipage.
Peut-être, Monseigneur, aurez vous été surpris de voir qu’en qualité de Sécretaire du Consulat de paix pour les Nations qui n’ont point de Consuls dans cet Empire, je n’aie pas agi directement auprès de l’Empereur en faveur des Captifs Américains. A quoi je répons que Si ce désastre fut provenu d’un Bâtiment échoué sur cette Côte, (comme i[l] arriva il y a trois ans d’un Bâtiment Prussien dont les Sujets furent renvoyés libres, et dont les ancres, Cordages et partie de la mature, furent envoyés ici dans cette Maison Consulaire par ordre de l’Empereur), àlors j’aurois dû sur le champ reclamer auprès du Gouvernement l’Equipage du Navire Echou. Mais dans le cas présent, où des Sujets Sont pris et détenus par ordre de l’Empereur, il ne m’appartient pas d’agir ouvertement pour eux Sans y être autorisé d’office par la puissance à laquelle appartiennent les sujets détenus.
Je Souhaite que la prolixité de mon stile ne déplaise pas à V. Exce. qui voudra bien supléer aux défauts qu’elle pourra y appercevoir.
J’ai lhonneur d’Etre