J’étais a lisbone en 1775. Je fus recherché par un capitaine simons qui emploia le major Bernard pour me proposer d’entrer au service des provinces unies de l’amerique: ne trouvant pas le capitaine assés authorisé et ne voulant pas non plus accepter sans la permission des ministres du roy je chargeai le capitaine simons des articles que je proposais pour etre ratifiés par le congrés, et jecrivis a monsieur de sartines. Je marquais a ce ministre que sentant fort bien que je ne pouvais pas etre avoué, il me suffirait qu’il ne me fit pas deffendre d’accepter, que je prendrais son silence comme une permission tacite. Le chargé des affaires de france alors a lisbone me dit quelque tems après, que vu que depuis la reforme derniere c’est a dire depuis la paix j’etais au service de pologne j’etais le maitre de faire ce que je croirais me convenir le mieux. J’attendis donc le Cap[itai]ne simons qui avait promis d’etre de retour dans quatre mois. Les quatre mois s’ecoulerent, plusieurs autres encor, et le cap[itai]ne simons ne parut pas. Au mois d’aoust ou de 7bre la Cour de portugal interdit ses ports aux vaisseaux americains. Quelques tems apres japris que le cap[itai]ne simons avait été un des premiers vaisseaux dont setait emparé la marine brittannique: ainsi perdant tout esperance d’avoir des nouvelles, en meme tems que je voiais s’ancentir la facilité de m’embarquer, je mis fin a mon sejour a lisbone. Mes sentimens sont encor les memes aujourdhuy, monsieur, et cest ce qui me procure lhonneur de vous écrire. Si mes services sont agreables au congrès, je devoue aux provinces unies de l’amerique le peu de talens que j’ay, ce que vingt deux ans de services m’ont apris, tout le zele dont je suis capable et le tems qui me reste a vivre.
Jay fait toutte la derniere guerre en canada dans le regiment dinfanterie de Berry. Ainsi vous voies que l’amerique ne sera pas un païs nouveau pour moy. Aprés la reforme qui a suivi la paix je suis, avec lagrement du roy, entré au service de pologne. Je suis successivement devenu general-major. Je le suis depuis dix ans. Si vous avés pouvoir monsieur, et la volonté de m’accepter en cette qualité, je deviendrai avec plaisir citoien d’un païs que jai toujours aimé et je lui consacrerai ma vie.
Si vous voulés comme il est juste prendre quelques informations sur ce qui me regarde, aiés la complaisance de vous transporter ches Son Excellence monsieur le baron de Quemantel ambassadeur du roy a la cour de portugal. Jay lhonneur detre conu de ce seigneur. Il demeure actuellement a lhotel de modene ruë jacob fauxbourg st. germain.
Je vous prie, monsieur, de me doner une reponse prompte et qui dans le cas de lacceptation me mette a portée detre rendu en amerique au comencement de la campagne. Dans ce cas vous voudrés bien mindiquer le lieu ou je devrai me rendre, le vaisseau qui devra me recevoir, la routte que je devrai tenir et pourvoir aux frais d’un voyage long et precipite. Mes moiens personels sont bornés et ne me permettent aucune depense extraordinaire.
Si vous lapprouviés je pourais emmener dicy un jeune ingenieur plein de talens, de feu, et qui n’est pas moins americain que moy.
Si comme on lassure mr. james murrai va remplacer mr. howe dans le comandement de larmée brittanique, je vous en fais mon compliment. Je le conais, il est vain plein de presomption, emporté; le flegme de Mr. Wasington lui fera faire bien des faux pas.
Jay lhonneur destre avec beaucoup de respect, Monsieur, Votre tres humble et tres obeissant serviteur