From Dominque-François Belletti (unpublished)
Trieste ce 21e du Fevrier 1783
Monsieur,

Il vous doiroit sembler hardi de vous voir paroitre des lettres d’une Persone, qui n’a point l’honneur d’étre a vôtre conoissance; mais comme la renomée de vôtre grand merit rempli d’humanité, et depuilé de tout prejugé a assez apris a reconoitre vos rares qualités, c’est pour cela, que je me suis pris la liberté de vous ecrir sans scrupule, car autrement j’aurois gardé le silence.

Sachant donc à quel degré arive vôtre bonté, et estimation pour vos semblables, il ne me reste a douter, que vous n’acceptiez pas, qu’avec des sentiments analogues a vôtre systeme, ce que je m’en vais vous deposer.

Je m’en rejouis premierement de tout mon coeur de l’hereuse issue de vos laborieux manèges; priant le Ciel de bien vouloir répandre sur la nouvelle République toute sorte des bénédictions, et de bien rafermir dans les ames de ses citoyens la parfaite harmonie, et la conformité de leurs sentiments, éloignat toujours les discordes, et mésintelligences.

Pour vous marquer donc, que mes expressions partent d’un coeur sincer, je souhaiterois bien volontier d’etre emploiè au service de vôtre respectable Republique ici, et dans tout le Littoral autrichien en qualité de Consul General, et devenir par là en état de pouvoir étre util dans les vues de commerce de ches vous avec les Etats de nôtre auguste Monarque; étant bien sûr, qu’on pouroit les pousser au point de les rendre remarquables, et reciproquement très-avantageuses.

Ma situation grace à Dieu m’accorde de vous faire offre de mes services sans étre à la moindre charge de vôtre Republique, car ad’ honorem il me sauroit bon gré d’accepter l’Emploi, comme de même j’en fus chargé de part de Son Altesse Royale le Grand Duc de Toscane; et qu’a present vient de m’étre proposé ausi pour le service de Sa Majesté très Fidele. Permetez moi, que j’aye l’honneur de vous dire, que persone mieux que moi sauroit preter de l’assistance aux Comercents Americains pour entamer directivement un commerce beaucoup fructueux entre les uns, et les autres Etats, puisque la Direction, que j’ai d’un de ces premiers Etablissements avec un quart d’intéret, soutenu par des remarquables Fonds, et de tres bons raports sous les noms de Belletti, Zaccar et Comp. l’étre assez bien conu par Sa Majesté mon souvrain, lequel s’a daigné gracieusement de me faire il-y-a quelque mois son Conseiller de Commerce ad’ honorem; la bonne inclination, que les principeaux Ministres ont pour moi; et les conoisences de commerce que j’ose vanter, tout cela sait me flater de pouvoir esperer lampreference.

Vous pouvez Monsieur a vôtre gré prendre vos eclaircissements la desus, ou par le moyen de ce Monsieur le Consul de France, ou bien à Vienne; étant sûr, que vous ne trouverez rien a redire. Je prens la liberté à seule instruction de vous remetre cijoint deux attestations en Copie, et les desirant en original, je ne retarderai pas de vous les envoyer promptement.

Si vous reputez donc utile l’election d’un Consul General dans cete Place, et si vous est en disposition de proteger ma Demande, je m’haterai, selon l’on me viendra prescrit, à faire mes demarches. De quelle maniere que vous trouviez ma proposition j’ose me flater, que vous m’honorerez d’une reponse pour ma direction, laquelle je trouverai assez plus agreable, toutefois elle sera accompagnée de vos favorables commandements, affin de pouvoir vous temoigner le respect, et l’estime avec laquelles j’ai l’honneur d’etre Monsieur Vôtre tres humble, très Devoué et très-obeissant serviteur

Dominque François Belletti

Addressed: A Monsieur / Begniamin de Franklin / Ministre Plenipotentiaire / des 14 Etats de l’Amerique / Paris
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