From — Girard (unpublished)
Quimper 2. 9bre. 1778.
Monsieur

Par l’article 30. du traité d’amitié et de Commerce entre la france et les etats unis de l’amérique, on a promis à nos bons amis un, ou plusieurs ports francs. Vous ne manquerez pas sans doute, Monsieur, de demender, au nom de votre nation, si bien representée par son createur, le port où L’on pourra trouver Le plus grand débouché pour vos Marchandises. Mais plus votre choix sera bon à cet égard, plus de dificultés vous aurez à obtenir d’autres ports semblables, à cause de notre propre commerce, qui ne doit pas etre sacrifié au votre, et à cause surtout du sistême actuel de nos finances, opposé à tout ce qui peut favoriser la contre bande.

En prevoyant cet obstacle tout naturel, j’ai cru devoir vous indiquer un moyen de le lever, en ne demendant qu’un port sans commerce, et éloigné de toute grande ville, port dont vous feriez un entrepot, soit pour y conserver les marchandises que vous acheteriez dans les tems d’abondance, soit pour y reçevoir les vostres jusqu’au moment de les vendre favorablement. Benaudet, où on peut arriver de nantes et de Bordeaux dans vingt quatre heures, me paroit etre celui qui vous convient le mieux. Il est a l’extrémité et au midy de la basse bretagne, entre deux montagnes, qui le mettent à l’abri des plus furieuses tempêtes. Il peut au moins contenir quatre cent vaisseaux, ayant deux lieues de longueur, et contenant une profondeur suffisante, pour faire floter les plus fortes fregattes.

A trois lieues au dessus, sur la même riviere est quimper Capitale d’un evêché du même nom; et à six lieues, au nord de cette ville est la riviere de    , qui conduit a Brest, et qui presque touche à sa rade. Par le moyen de neuf à dix nouveaux chemins (il y en a deja sept grands) quimper aura des Communications faciles, dans toute la basse Bretagne; et pour rendre cette ville et son grand port, très commerçants, il suffiroit de rendre navigable par le milieu de la province les rivieres qui y prennent leur source. Vous avez, Monsieur, trop de génie et trop de Connoissances pour ne pas prevoir les avantages que votre nation et la notre tireroit de ce nouvel etablissement. Le port de Benaudet est si beau et si sûr qu’il a disputé longtems avec lorient l’avantage la Compagnie des indes. Vous trouverez au Bureau de la Marine tous les renseignements que vous pourriez desirer à cet Egard. En attandant je vous envois un imprimé, qui vous donnera une idée de L’extremité de ce port, appellé lauros (?) où il y a toujour mer, et au dessus duquel endroit, il y a un vaste plage, où L’on pourroit bâtir à la longue, la plus grande ville: je donnay ce projet  . Un intendant et un gouverneur, qui avoient vû le local, approuverent ce projet; mais quand on a toujours des guerres à craindre, et peu de fonds à dépenser, pour l’intérieur du royaume, on ne peut rien entreprendre;

Il faut cependant convenir qu’un port de Roi, pour les fregattes seulement, faciliteroit les armemens, et des vaisseaux, et des fregattes, et procuroit au roy En moins de dix ans, un nouveau departement, de Marins, qui En produiroit plus de mille. Je vous prie, Monsieur, d’en conférer avec M. de sartine, et de vous Entendre tous les deux, pour faire de Benaudet, soit un port d’entrepôt pour vous, soit un port de Roy pour les fregattes seulement. Mais si vous adoptez Mon projet, je crois qu’il seroit prudent, avant de le divulguer de faire acheter, soit à Benaudet même soit à Lunros, les deux à trois villages, qui sont aux bords de ces deux endroits, ce qui ne coûteroit pas vingt mille francs, et ce qui donneroit à droit et à franche, plus de cent journeaux de terre de Chaque Côté.

Je vous prie, Monsieur, d’agréer l’ouvrage cy joint comme un ouvrage que je rends à votre mérite supérieur, et à votre juste zélébrité. Je vous demende en même tems, votre amitié et votre estime. J’ai Lhonneur d’estre avec tout le respect possible Monsieur vostre trés humble et obeissant serviteur,

Girard
avocat
Notation: Free Ports
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