From — Saintmartin (unpublished)
M. Doct[eur] francklin a Passy prés paris
Bordeaux ce 26 aoust 1777.
Monsieur,

Quoyque je n’aye pas le bonheur de vous etre connu, j’ose neamoins me flater que non seulement vous ne desaprouverés pas la liberté que je prends de vous ecrire, mais encore que vous voudrés bien vous interesser pour moy auprés de S[ieu]r Thomas Morris l’un des commissionaires du Congrés, pour qu’il accepte ou fasse accepter par M. Delap quatre lettres de change dont je suis porteur sur luy. Voicy de quoy il est question.

Un de mes capitaines vendit au Cap francais le mois de Xbre dernier, 200 barils de poudre et quelques autres munitions; cette vente qui fut sans doute faite au S[ieu]r Ceronio par le ministere d’un negociant du Cap, devoit etre payée 3 mois aprés. A terme ecoulé on ne peut y satisfaire sous pretexte de quelque evenement inattendu, les deux negociants du cap qui avoint sans doute procuré cet achat au S[ieu]r Stephen ceronio autre commissionaire du Congrès, suplierent mon dit capitaine de ne point agir a la rigueur envers le S[ieu]r ceronio, et l’engagerent de se contenter pour le moment de deux lettres de change ensemble 14000 l.t. tournois sur france qu’ils s’obligerent d’endosser, et que le reste seroit payé en argent dans tout le courant du mois de mars. Ce qui fut accepté, et je reçus au commencem[en]t de may dernier ces deux lettres de change, l’une de 6000 l.t. et l’autre de 8000 l.t. tournois tirées du cap le 18 mars dernier par le sieur Stephen Ceronio, sur M. Thomas Morris au domicille de Mess[ieurs] Delap de cette ville. L’une de ces lettres est a 4 mois et l’autre a 6 mois de vue. Je les fis presenter dans le tems chés M. Delap, le S[ieu]r Morris etoit alors a nantes, j’y envoyay ces deux lettres, il demanda quelque delay pour les accepter sous pretexte qu’il n’avoit point d’avis. On le luy accorda, mais ayant voulu les representer de nouveau, on ne trouva plus le s[ieu]r morris a nantes, on me renvoya ces lettres sans etre acceptées. Ce fut alors que pour en fixer l’epoque de l’echeance je me vis forcé de les faire protester faute d’acceptation. Quelques jours aprés je fus informé que M.Morris estoit dans cette ville, je cherchay a luy parler, je ne pus jamais le joindre. Le sieur Delap se chargea pour lors de les presenter luy meme, mais mons[ieu]r Moris refusa de nouveau de les accepter et repartit de cette ville pour nantes.

D’un autre cotté le s[ieu]r ceronio ne fut pas plus exact a remplir la promesse qu’il avoit faite a mon capitaine de payer le reste de ce qu’il devoit pour ces poudres en argent, puisque ce capitaine a encore eté forcé de prendre deux autres lettres de change ensemble 20 mille livres tournois tirées le 6 may dernier a huit mois de vue, ce qui ensemble me fait un capital de 34 mille livres dont je ne puis ny jouir n’y faire mes affaires. Cela me fit prendre le party d’ecrire le 9 juillet dernier a M. Morris a nantes. Il daigna me repondre, voicy sa lettre. Nantes le 17 July. 1777. “I have previous to the receivet of your much estimed favour dated the 9th instant, given directions to Mess. S. L. J. N. Delap to take up the two bills drawn the 18th march last by Mr. Stephen ceronio together £ 14000 in your possession, wisch will be complyed with the remainin £ 14000 wil also be payed at maturity, and I hereby requiert you make application to Mr. Delap for that purpose. With an offer etc. Je donnay communication de cette lettre au S[ieu]r Delap qui s’est constament refusé a y satisfaire; vous sentés monsieur que dans cette perplexité je ne puis faire aucun usage de ces lettres, ce qui me gene et d’un autre coté vous jugés le tort considerable que des protest vont occasioner au credit des commissionaires du Congrés. J’ay donc cru avant d’en venir a cette extremité que je ferois bien de vous en prevenir, persuadé que vous voudrés bien Monsieur determiner M. Morris a me faire payer, ou me faire donner les surettés requises pour que je le sois au moins a l’echeance de ces lettres.

Que je serois heureux Monsieur si cette occasion me mettoit a meme de pouvoir vous etre utile ou au Congrés, et vous prouver la parfaite estime et le profond respect avec lequel j’ay l’honneur de me dire Monsieur Votre trés humble et obeissant serviteur

Saintmartin

mon adresse est a Saintmartin negociant a Bordeaux.
Addressed: A Monsieur / Monsieur le Docteur francklin / A Poissy, prés paris
Written beside the address: par Mabille rüe prés celle des Precheurs. Si monsieur franklin veut m’adresser la reponse qu’il la presente, il me fera plaisir.
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