Blanchette Caillot to William Temple Franklin (unpublished)
Bélloy ce 4 juillet 1786 No. 12

Je suis dans la plus grande inquiétude mon bon ami sur le sort de mes lettres je vous prie de bien éxaminer les No. et de me dire si vous les avez reçus exactement vous ètes bien aimable mais tant soit peu étourdi. Vous savez combien j’ai de dispositions à m’alarmer, et il eut été de la grande prévoyance de prendre vos precautions avant de quitter votre campagne, afin de pouvoir me rendre un compte éxacte, vous ne l’avez pas fait! Je ne vous en aime pas moins je vous prie seulment de me dire dans la premiere de vos lettres les No. qui vous manquent—

Je suis bien aise que la chanson vous ait fait plaisir elle n’est pas de moi. Je n’ai jamais voulu apprendre a faire des vers dans la crainte de devenir ce que nous appelons dans notre langue présieuse, j’ai presque toujours remarqué que c’est le sort des femmes auteurs, cette chanssons m’a parue comme à vous faite pour vous je vous l’ai envoyée, autant qu’il me sera possible je vous diroi de cette maniere tout ce que je ne voudroi pas vous écrire, à present plus que jamais dans la crainte où je suis que mes lettres ne soyent perdues, et puis mon ami il faut bien user d’un peu de politique avec ma petite éxélence. Plus que jamais je suis persuadée que vous ne comptez pas revenir il n’est pas besoin de bâtir en amerique quand on veut habiter l’Europe. Vous me parlez pourtant de Grands voyages mais toujours accompagné de la chere étourderie vous ne me dites pas dans quelle partie du monde, j’imagine que c’est dans la votre (vous savez que je vois peu à mon avantage) c’est un chagrin de plus pour moi que ce voyage, c’est pour votre interèt je n’ai plus rien à dire je crains seulment de ne plus recevoir de vos nouvelles, c’est encore ce que son éxélence a oublyé de me dire elle ne s’est pas souvenue combien c’etoit interessant pour son ami. Au surplus j’attends j’espere qu’avant votre départ vous m’ecrirez la longue lettre que vous me prometez depuis si long-tems et qu’elle m’expliquera tout au plus juste, depuis que vous êtes en amerique vous n’avez pas encore eu le tems de me l’écrire, mais mon ami pourquoi donc toujours attendre la veille du départ des vaisseaux pour faire vos dépêches. Que ne tenez vous une lettre préte en verité [illegible] et puis vous m’écrivez avec confiance, aimez moi et continuez de m’ecrire. Oh! quand une fois ces hommes sont surs…Je vous pardonne (quoique vous ne croyez pas neccesaire de me le demander) je vous pardonne d’avoir laissé partir un vaisseau sans lettres pour moi, en verité mon ami c’est une grande offence faite à mon coeur et aux sentiments qui nous attachent l’un à l’autre, mal;gré tout votre ésprit je doute que vous puissiez vous justifier de n’avoir pas à l’exemple de votre amie une épitre toujours prête. Je voudrois que celle ci put partir avec le No. 11, que j’ai envoyé à notre ami. Je n’ai recu la votre dattée du 6 may qu’apres le départ de ce numero, j’aurois voulu vous répondre tout de suite mais il ne m’a pas été possible et à présent je crains qu’il ne soit plus tems, alors vous ne receverez qu’une lettre à la fois ce qui me fait peine, car enfin! deux lettre à la fois oh! le bel éxemple à suivre! Cette lettre du 6 may est bien aimable pourtant! Et j’ai un doux plaisir à retrouver mon ami toujours le même elle m’est parvenue le 26 de juillet vous voyez qu’elle n’a pas été long tems en route. Et en cela elle m’a parue encore plus aimable puisqu’elle m’a donné plus fraichement de vos nouvelles.

Md. le B…est bien sensible à votre souvenir. Elle est venue diner ici avec son mari. Elle est grosse, gaie, heureuse, helas! comment ne le seroit elle pas elle est toujours aimée toujours [heureuse ??] pres de ce qu’elle aime…

Je compte avoir ici pendant quelque tems Mlle de M…et lui dire que vous m’avez parlé d’elle. Elle vous en saura bon gré pour moi je suis toute édiffiée de ce souvenir. Oh! mais c’est que le coeur de mon ami n’a pas de rancune helas! il a…mais je ne veux pas blesser sa modestie, la bonne vous aime presqu’autant que moi elle est bien aise que vous ayez pensé à elle, elle vous en remercie de tout son coeur, elle se porte bien mais elle est encore foible et prend toujours du quinnine, mon pere se porte mieux que jamais ma fille est parfaitement rétablie, moi je suis assez bien mon coeur seul est malade, cependant je regarde comme un grand bonheur de ce qu’il n’y a pas de moyen de le guérir. Voila mon bon ami les nouvelles d’ici de la solitude, baucoup de lecture, baucoup penser, voila mon passe tems cécilia m’occupe dans ce moment je l’aime baucoup parceque dans ce charmant ouvrage le heros vous ressemble parfaitement une de ses grande qualite est d’etre tres volontaire, je vois Md St [per à vis] autant qu’il m’est possible elle est vraiment tres aimable et sur tout tres gaie, je ne lui sait qu’un défaut c’est qu’elle est à cent mille de savoir le secret de mon coeur et par cette raison la même elle ne le saura jamais.

Il faut que je vous dise encore un de mes passe tems, quand j’ai un moment de liberté, je prends mon manuscrit cheri, ce sont des lettres mises dans un petit cartons à déssins, pas plus grand que le papier à lettre et nôué sur les bords avec des rubans ce qui met les lettres presqu’en en [??] prêsse, et ce qui donne la facilite de les lire comme se elles ètoyent reliées, je vous conseille mon ami de vous servir de cette maniere elle est commode pour lire, pour emporter, et surtout pour ne rien égarer.

Je vous remercie des bonnes nouvelles que vous me donnéz de votre vénérable pere je suis bien aise que Be…se porte bien, il est entré au colege à l’age ou dans notre pays on en fait sortir nos jeunes garçons dites moi mon bon ami si c’est par cette raison qu’on voit tant d’hommes chez vous, tant d’enfants chez nous. Il faut que je vous parle encore des Br…Md p…est regrosie oh c’est un térible homme que ce Monsieur Pa! Il est toujours a sa terre avec son beau frere sa belle soeur laissant le pauvre pere à pas…malade de la goutte et la belle mère se lamentant aupres de lui et surtout s’ennuyant baucoup. J’aurois voulu les aller voir j’en ai eu l’occasion on m’y auroit menèe diner impossible mon bon ami je vois que je ne retourneroi jamais dans ce qui cependant est presentement un désert pour moi, tout désert qu’il est on en veut pas entendre parler, comme la haine rend injuste p…et puis tout ce qui est anglois est en horreur on ne peut même entendre prononcer le nom de votre papa de ce bon papa qui mérite un culte par ses vertus par ses…oh! mon ami imitez ces mêmes vertus, et ne soyez jamais injuste à ce point vous ne sauriez croire comme c’est insuportable. Au surplus on n’a jamais été plus assidu et je n’ai qu’a me louer des attentions et des soins, je tâche (ètant dans l’impossibilité de faire mieux) de reconnoitre ces bons procédés par des comploisanse et tout ce qui peut dédomager de l’essentiél, mais aussi cet éssentiél! il n’est plus en mon pouvoir! il n’est plus tems! C’est une chose bien éxtraordinaire! que les hommes fassent presque tous la mème faute, il possedent un coeur ils ne font aucune frais pour le conserver, ils le perdent ils grondent, oh ils ont beau gronder le coeur se donne mais il ne se rend pas. Adieu mon ami. Voila bien du bavardage pour ne rien dire. Mais vous dites que vous aimez mon babil vous voila servi a votre volonté—Aimez moi. Oh! écrivez. Vous voyez—on ne peut je crois être mieux obei. Helas! je ne puis vous obeir en tout je ne puis embrasser pour vous l’infortuné… oh mon ami cet endroit de votre lettre a fait bien de la peine à mon triste coeur. Adieu n’oublyez pas de me dire pour les Nos. Songez combien on est gêné d’ecrire quand on craint pour ses lettres.

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