Jacques-Donatien Le Ray de Chaumont fils to William Temple Franklin (unpublished)

Vôtre lettre est venu me trouver mon cher Franklin au moment ou mon mal de jambe me quittoit, cétait mal prendre son tems pour avoir une prompte reponse, depuis un mois que j’etais emprisonné je ne respirois qu’apres l’instant de pouvoir reprendre la clef des champs, aussi l’aije saisi avec bien de l’empressement et je n’ai voulu revoir mes livres et mes papiers que lorsque je me serais amplement dedommagé de touttes les privations que j’avais souffertes, encor même ajourdhui faut il pour me rapeller a mon bureau une lettre aussi charmante que la vôtre ma foi mon ami, mon ami, ecrivez en francois pour vôtre honneur et nôtre plaisir soiez sur que l’un et l’autre y trouveront leur profits. Je vous assure que d’apres l’elegance de vôtre style je regrette fort que ma lettre du journal n’aies pas passée par vos mains avant d’y être insercé vous l’auriez cru moins rendu digne d’occuper un moment la toillette des jolies femmes de Paris. Je crois bien que vous n’auriez pas fait grace a mon cher papa je ne regrette cependant pas tant d’avoir mis ce mot, il donne a presumer que l’auteur de la lettre est fort jeune et rend plus indulgent en faveur du style. Au reste on ignore que c’est moi, et quoique mon cher papa soit mis en evidence, le cher fils reste inconnu et bien m’en prends. Apres vous avoir loué mon cher Il faut que je vous blame, comment pouvez vous me dire de la part de Mlles. Brillons qu’elles me trouvent charmant, sçavez vous bien que c’est la plus grande injure qu’elles puissent me dire, car elles ne peuvent me trouver si charme que dans l’absence que je prolonge beaucoup plus que je l’avais promis. Si elles ont encor quelque reste d’amitié pour moi il faut qu’elles me trouvent execrable, abominable, destestable &c &c &c & voila les sons qui dans ce moment y peuvent plus flatter mes oreilles, en attendant dites leurs mil choses honnetes de ma part.

Le Sieur Carry n’a pas tant perdu sa tête que nous le pensions, il m’avait emprunté 12 francs lors de son depart de Paris et il n’a pas été si fol que de me les rendre en quittant Pontlevoq. Il m’avait dit que son depart ne serait que dans deux mois, mais il l’a un peu precipité et mes 12 francs se sont [?] de la hâte avec la quelle il a fait ses paquets ils ont été entierment mis dans l’oubli. Le vilain avait même esquivé de me preter un livre Anglois si vous le revoiez et que vous soiez un peu maitre des cordons de sa bourse taches je vous prie de ravoir mes 12 francs je regrette de les voir dans une terre aussi ingratte, ils n’y fructifieront pas.

Personne ne nous a parlé de l’histoire du Duc de chartres, excepté vous, et cest bien etonnant qu’aucune des lettres que nous recevons de Paris n’en fasse pas mention au reste cet accident me touche moins que s’il etait arrivé a tout autre, s’il s’est cassé les jambes qu’il n’en fasse avec les arbres qu’il a abbatus dans le Palais Roial.

Je suis bien triché que vous ne me donniez pas de nouvelles de mon ami Robbing-wood, je crains bien qu’il ne se soit pas bien trouvé de vôtre nouvelle nomination, son aimable compagne my little mare bas la campagne plus que jamais nous avons couru ensemble un cerf dans la forest de chambor avec l’equipage de Mr. le Marquis de Polignac qui est composé de quarante chiens Anglois: Je pourois me donner ce plaisir la autant de fois que je voudrais mais les chiens ne sont pas encor assez bien formés ils forment cinq ou six chasses a la fois et ne forcent rien dans un an je serai volontiers de la parti parcequ’ils seront alors tres bon de depit de n’avoir rien forcé nous avons voulu nous [?] le lendemain avec une petite meutte de 12 excellents chiens; on se plaisit pour tirer le comte de chiverny et moi nous avons tiré chacun deux coups sur un cerf qui nous passoit a belle distance et nous ne l’avons seulement pas effleuré et voiez un peu comme c’est malheureux hier j’ai tué un renard en lui envoiant mes deux balles, ce qui est un coup bien difficile.

Puis que vous pretendez être mon debiteur je m’en vais vous donner une occasion de vous acquitter envers moi. J’ai besoin de 20 livres de poudre—pour faire present aux etrennes a nos gardes si vous voulez me faire le plaisir de m’en acheter cette quantité et de la remettre a M. de la Touch pour qu’il me la fasse tenir par la premiere occasion je vous serai fort obligé.

Je m’en vais ecrire a mon pere aujourdhui pour lui demander a revenir dans le milieu du mois prochain avec Mr. et Mde. foucault. J’ai a peu pres terminé tout ce que j’avais a faire et Je serai bien aise de revoir mes amis a Paris. Ma soeur est un peu scandalisé de voir que vous puissiez imaginer que j’etais capable de croire que vous Craigniez que je n’interpreta mal le mot de derangée elle soupcon de son côté que s’il y avait quelque derangement chez vous quand vous avez ecrit cela c’etait ni dans vôtre santé ni dans vôtre conduitte mais...au reste elle me charge ainsi que toutte ma famille de vous temoigner tout nôtre regret de ce que vous ne voiez pas tout en jaune a Paris pour voir tout en rose a chaumont. Elle me chargent aussi de vous faire the compliments of the season they are as the air we respire at chaumont pures et vifs accept these my dear Sir of your most affectionate friend

Le Ray de chaumont Jr.

I beg you will make my wishes and compliments of the new year acceptable to your venerable grand father and to all our friends.
Notation: La Ray de Chaumont Janr. 1783.
639116 = 038-u704.html