Blanchette Caillot to William Temple Franklin (unpublished)
Bé[lloy]. ce 24.[-31] juillet 1785

Je ne sais quand cette lettre partira. Je ne sais pas même le moyen de la faire partir, vous ne m’avez instruite de rien sans ma precaution, vous seriez parti sans m’ecrire, bon dieu! Dans quelle inquiétude je serois! J’en ai encore passablement, je tremble que vous ne soyez malade, vous où votre pere, oh mon ami pouvez vous me laisser l’ame si en peine.

Quel départ et qu’il me rend malheureuse. Tout me devient insuportable, paris m’av[oit] paru affreux mes plaisires insipides ce palais royale tant vanté par vous m’a rendu plus triste, en passant devant l’h…j’ai pensé m’évanouire, une chôse bien sure c’est que si j’etois assez heureuse pour passer ma vie avec mon ami ce seroit bien loin de cette turbulante ville, j’y étois comme un pauvre blessé à qui on donne de violente secousses qui le font souffrire mille fois davantage. Mon ami cette ville n’est bonne ni pour les gens heureux ni pour les malheureux, elle n’est faite que pour les indifférens, je ne l’habiterois jamais.

J’espere avoir une lettre mais qui donc peut la retarder? Pour moi mon ami je vois que je ne peux vous ecrire a peu pres qu’une fois par mois, il est de toute nécessité que je sois seule, et vous savez que je ne le suis qu’a cette distance de tems. Quand il me viendra d’heureuses occasions votre coeur vous dit surment, que j’en profiterais.

Madame il part demain à quatre heurs. Votre pauvre amie n’a pu dissimuler long tems son trouble cependant l’effort qu’elle a fait pour prendre sur elle l’a fait tomber sans connaissanse, heureusement qu’il n’y avoit que les femmes pres d’elle, les bonnes amies ont prétendu que c’etoit les ôdeurs, elles l’on fait revenir, et elle lui a bien prié de garder le secret de peur d’inquiéter. Il faut vous dire mon ami qu’on étoit persuadé que l’on vous verroit encore avant votre départ trop vaine et trop douce ésperance il a fallu nous perdre, une minute a suffi pour vous faire evanouir. Oh mon ami! cet espoir detruit, à rendu votre départ plus affreux.

Je ne puis me persuader encore que vous soyez parti, peut etre embarqué! Je croyois toujours que les affaires les embalages &c &c…[word crossed out] retarderoient ce cruel voyage. Mais non! vous êtes parti et je ne vous ai pas vu. Mlle. B…m’a ecrit que votre départ ètoit bien touchant qu’il y avoit de vos gens qui vous suivoient, et qui ne pouvoient vous quitter, oh mon ami! mon tendre ami!…Je n’ai point encore vu Bé…Il me rendra compte de votre diner il me dira comment il vous a trouvé, je crains que vous n’ayes eu plus de courage que de forces, comme j’ai été emmené pour n’etre pas trop pres de vous! Heureusement que la force ne peut rien sur le coeur. On peut me conduire ou on voudra. Le mien sera toujours pres de vous. Adieu mon tendre ami. Adieu, il ne faut pourtant pas vous quitter sans dire un mot du joli petit chat que vous m’avez donné, il embêllit tous les jours, il est doux aimable et se fait sans cesse admirer par sa bonté et sa grande blancheur. Adieu cette lettre n’est qu’une occasion, dans quinze jours je compte vous écrire un volume, car je serois surment seule.

ce 31 juillet 1785

Enfin cette lettre tant attendue est arrivée hier seulment je vous laisse a juger de mon tourment pendant 7 jours cette lettre en a été 12 a venir. Enfin la voila. Elle me dit que votre papa se porte bien. J’espere que votre santé est aussi meilleur vous ne m’en parlez pourtant pas. Je suis desolée de ce que vous m’envoyez par le Gs…Nous n’ètions pas du tout convenus de ça ensembles croyez vou donc que je n’aurai pas pu vous faire les avance d’une année et même plus, je suis vraiment tres chagrine de cette prévoyance qui peut vous gêner surtout dans ce moment.

Vous vous etes bien trompé si vous avez pensé que je doutois de la verité des traités, non mon bon ami je ne vous crois pas capable d’un pareille mensonge. Dans ma premiere lettre (qui sera sur du grand papier) je vous éxplique ce que j’ai voulu vous dire.

Adieu mon tendre ami, adieu tout ce que j’aime, c’est demain helas que vous vous eloignes encore, penses à la pauvre Blanchette aimez la, oh mon ami! aimez la toujours. Si j’avois été instruite plutot vous auriez déja cette lettre.

Adieu adieu adieu. Mille tendresses

Je ne puis ecrire tant je suis pressée.

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