Blanchette Caillot to William Temple Franklin (unpublished)
Bé…ce 8 novembre 1786 No. 16

Je vous ai promis mon bon ami de revenir sur le voyage de Gé…

parceque je n’avois pas eu le tems de vous parler de l’abbée de la Ro…qui y a passé plusieurs jours avec nous, et qui m’a baucoup parlé de vous, il m’a dit que vous lui aviez ecrit que votre pere avoit un peu perdu de son aimable gaité, vraisemblablement parceque vos dames sont plus sérieuses que les nôtres! Et que vous même ne pouviez vous empêcher de les regreter, en ce la je vous trouve parfaîtement aimable car je me suis attribué une grande partie de ces regrêts. Le bon abbé m’a dit encore qu’il ne tarderoit pas à vous écrire, et m’a demnadé si je n’avois rien à mander à votre pere et à vous. je l’ai prie d’ecrire pour moi au bon et vénérable papa, que je n’avois pas perdue mon habitude de pa…et que je l’embrassois de toute mon âme, l’abbé en vouloit autant pour vous, mais il n’a obtenu que des amitiés et des compliments, c’est bien assez quand il y a un troisieme pérsonnage entre Madame Blanchette et son éxélence. Je viens de passer trois semaines à Cr…je me suis fort paisiblement amusé. (car à présent tous mes plaisirs sont paisibles) je compte retourner à la ville à la fin de ce mois, la saison annonce d’être tres rigoureuse, quoi qu’elle ne fasse que commencer le froid est déja insuportable ce qui ne m’empêche pas d’avoir l’espoir de passer mon hiver assez agréablement. Nous passerons un mois à Ver… peut etre un autre à paris chez Monsieur D’ar…ajoutez les plaisirs de notre petite ville, tout cela réuni sera bien assez pour moi. Je vous avoue mon ami que je ne suis pas fachée de me dissiper en compagnie l’idée de ne vous plus revoir vient bien se présenter à moi, mais bien moins souvent que dans la solitude. Il y a bien des femmes qui cherchent les plaisirs faute de raison, moi je les cherche parceque j’ai de la raison. Oui, Monsieur j’en ai et baucoup. Mes peines et mes réfléctions m’on donné quarante ans. J’ai renonce a cette séduisante tentative de plaire je renonce aux hommages. Vous parti, il me semble que j’ai assez vécue. Oui mon ami, je vous jure que je renonce à tout. A vingt neuf ans ce n’est pas avancer de baucoup, le tems ou il faut rentrer dans le sentier du calme et de la tranquilite. Une seule chôse est à craindre c’est qu’au premier mot de votre retour ce bel édifice de raison poura bien s’écrouler et la pauvre petite fole restera seule. Mais ce retour! ne viendra pas! Plus j’y pense, et plus je vois que vous resterez dans votre patrie, voila pourquoi je cherche le monde, c’est quand on a plus d’espoir que l’on pense à se dissiper. Je fonde l’idée de ne vous plus voir sur la volonté de votre pere qui veut que vous ne le quittiez pas pendant sa vie, votre respect pour cette volonté qui ne s’est jamais dementie vous fera rester. Vous voyez qu’avant le tems ou vous serez libre il se passera des années qui vous [auront ??] donné une forte dose de raison cette raison vous fera cherire votre patrie plus que vous ne la faite présentement. Et même à présent n’aimez vous pas déja votre terre de maniere à me prouver que je ne me trompe pas mon ami! Mon bon ami! Je vous le repette vous ne reviendrez plus! Ce qui me console c’est que je vous rends la justice de croire qu’en me promettant de revenir vous en ètiez persuadé et que vous même êtes le premier trompé. Si vous saviez combien il est doux pour mon coeur de penser que votre attachement ètoît sinsere que mon ami ètoît vrai! Que cette consolante idée de m’avoir rendue heureuse, serve au bonheur de votre vie, comme elle servira au bonheur de la mienne.

Vous voyez mon ami que je ne puis perdre l’habitude de causer avec vous sans rien dire il faut pourtant que je me corrige afin de n’etre pas grondé par mon tres cher et tres grave républicain.

Eh! bien mon ami dans mon voyage de Cr…j’ai fait l’apparition d’une matinée à paris j’ai été voir la maison Br… Madame de Mal…est fort bien remise de sa couche quand à sa santé mais nullement quand a son coeur car elle pleure son pauvre petit enfant tous les jours vous croyez bien que j’ai partagé sa peine? Sa soeur est remonte dun dégré relativement au froid de son âme ce qui ne me fait rien vous savez qu’il y a long tems que je sais à quoi m’en tenir. La maman m’a comblée de caresse le pauvre pere est chargé à faire peure, ce qui je vous assure m’a fort affligé car je l’aime bien sincerment. On m’a dit qu’il ètoit baucoup mieux. Mais son genre de goutte est fort inquiétant elle varie baucoup, d’une minute à l’autre elle peut l’étouffer ce ceroit une grande perte pour ses amis et pour sa famille. Nous somme trés bien le dernier petit mari et moi il dit qu’il m’aime de tout son coeur moi je le trouve bon petit enfant tout à fait doux complaisant si notre amie n’est pas heureuse avec lui la faute sera de son côté à elle. Le beau personnage n’y ètoit pas je me suis encore procuré le petit plaisir de ne point demander de ses nouvelles.

Les deux soeurs m’ont baucoup parlé du fils de notre obligeant voisin. Il est bien dans le chagrin. Monsieur de Nérac est mort ce qui rend ce pauvre jeune homme fort inquiet sur ce qu’il va devenir une chose devroit pourtant le rassurer c’est qu’il a reçu une fort bonne éducation qu’il a de l’esprit de l’activité et que tout cela doit contribuer a lui faire trouver un employ honnête et a son gré. Surment le pere vous aura marqué tous ces détailles, car je sais que des dépêches ont due partir le premier de ce mois. J’aurois bien voulu faire partire une grande lettre avec ces mêmes dépêches mais il me fut impossible de l’écrire. Vous ne receverez qu’une tres petite épitre qui vous dira que je ne pouvois vous en écrire une plus longue. Pour celle ci je ne sais quand elle partira. J’avoue que c’est un chagrin pour moi de voir que mes lettres sont si long tems en chemin. Cependant j’ecris aussi éxactement qu’il m’est possible il me reste à présent mon ami à vous parler des nouvelles de St G…elle sont fort triste. Mademoiselle Dillon est morte et a emporté les regrets de tous ceux qui ont eu le bonheur de la connoitre elle aura les votres bien surment je sais que vous l’estimiez véritablement si toutes vos afféctions mon cher f…sont aussi bien fondées que celle la il est permis de ressentir un peu de vanité d’être aimé de vous.

Md de St per…est partie pour six mois elle est allee voir une de ses amis qui demeure dans le fond de l’auvergne ce départ m’a affligée, j’aime baucoup cette dame il est impossible de s’ennuyer un moment avec elle heureusement deux de ses amies sont restées elle sont aussi bonnes, et aussi aimable qu’elle. J’espere en faire ma societé la plus intime pour cet hiver nous avons déja de grands projets pour la redoute non pour danser mais bien pour babiller. Une de ces charmantes fille est Mlle Dubreuil dont surment vous avez entendue parler chez vos cousines. Ces deux amies et Md St per…sont venus coucher ici plusieures fois ces parties de plaisirs ont toujours été charmantes il ne manquoit qu’une personne pour qu’elles fussent parfaîtes mais helas! cette personne ètoît bien loin. Adieu mon bien bon ami voila des détailles, il me semble pourtant que je ne vous ai pas dit la moitiée de ce que je voulois par éxemple que je vous aimois plus tendrement que jamais oh! sans doute c’est parceque vous le savez bien! Adieu adieu—Donnez moi donc un moyen pour vous faire tenir ce que j’ai a vous—

Md le B…et Mé…vous embrassent de tout leur coeur nous avons bien parle de vous.

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