From — Barboutin l’aîné (unpublished)
Bordeaux Le 18e Novembre 1784
Monsieur

Je vous prie de mexcuzer si je prends la liberté de madresser à votre Excéllence.

Ma situation triste, aprés trante cinq années de peinnes et de traveaux, moblige de recourir à vos bontés; permetés moi que je vous en fasse un petit detaïl.

En mille sept cents soixante dix sépt, au mois de juïn, comandant le navire l’harmonie de ce port, messieurs hirygoyens fréres ârmateurs, chargé d’une riche cargaison de trois cents mille Livres bien assortie, je fits routte pour le continant de Lamérique Septentrionalle, dont vous ettes un des chefs.

Je fits ma vente, et lon me paya en papier monoyë du congrés, que je ne pris que sur la foi publique.

Je naurés pas autant à me plaindre, si on mavoit payé en entier tout de suitte, comme etoit mes conventions avéc mes debiteurs; mais point du tout, j’ai receu partie de mon dû en mille sépt cents soixante dix huit, mille sépt cents soixante dix neuf; et même en mille sépt cents quatre vingt; tems de la plus forte dépréciation; mais ji etois forcé par le tender Law, ce qui m’a mis hors détat de pouvoir employer ce même papier en denrées du Lieu; en concéquance il est resté stérille en mes mains; et qu’el mouvement que je me sois donné depuis je n’ai peu employer ce qu’il m’en reste à aucun prix.

Et celuy que j’ai employé avéc une perte considérable, et que j’ai chargé ma etté pris, par les anglois; moi même j’ai etté pris, soit sur mer, soit sur terre; et ce qu’il me restoit a terre partie ma etté pillé, brulé par les corsaires Refugiés; et le reste vollé, par les blans, et les négres du Lieu ou jetois habitant; puisque la justice de sommersét en maryland en ont condamné cinq à estre pendu, pour mavoir vollé environ vingt mille Livres tournois, dans mon magazin qu’ils ont brisé pour y entrer la nuit du cinquième fevrier mille sept cents quatre vingt trois; mais cella ne ma pas fait trouver mes marchandises, ny ne ma rembourcé de ma perte.

Je me trouve donc porteur de cinquante mille dollars environ, de papier monnoyë du congrés des treise Etats ûnis dont quarante mille pour mon propre compte, et le reste pour celuy de divérs; des emissions de mille sépt cents soixante seize, mille sépt cents soixante dix sépt, mille sépt cents soixante dix huit; et de mille sépt cents soixante dix neuf; que javés pris le parti de faire passer dans le tems en france; croyant pouvoir en retirer quélque chose; ou du moins l’espoir à l’advenir d’un dédomagement.

Mais suivant le resolve du congrés depuis que j’ai laissé le continant; si vous pouviés me rendre le service monsieur de vous en charger pour me les faire enregistrer, je vous les enverrés, et me faire delivrer les certificats que les Etats ûnis accordent à ceux qui en sont legitimement porteur; portant interét de six pour cent far anum; comme ma fait l’honneur de me l’ecrire monsieur De Marbois, consul genéral de france, à philadelphie, en dattedu vingt quatre aoust dernier.

Je vous devrés toute la reconnoissance, etant la seule resource pour faire subsister ma famille, et aquitter mes dettes causées pour ce même voyage.

Et pour vous assurer de ma probité, et vous confirmer que je ne vous en impose point, vous pouvés vous informer à monseigneur De Castries ministre, qui en a eû connoissance, et qui ma honnoré de sa protéction; ainsy que méssieurs Dudon pere et fils procureur genéral du parlement de Bordeaux.

Je vous observerés encore que j’ai eû le malheur dy perdre mon navire par la force supérieure du mauvais tems, et par les Ennemis des amériquains alors, qui mentouroit, sur la cotte de la virginie, Le dix septième janviér, mille sépt cents soixante dix huit, je suis porteur de toutes les Déclarations, et pièces au soutient en anglois, par devant méssieurs les juges de paix du lieu de mon nofrage.

Espérant de vos Bontés, et bienfaisance l’honneur de votre reponce, je ne césserés de faire des veux au ciel, pour la sancté et prosperité de votre Excéllence.

J’ai l’honneur destre avéc le plus profond Respéct, Monsieur, Votre trés hûmble et trés afféctionné et obeïssant serviteur

Barboutin ainé

Mon adrésse Ruë du Couvent aux chartrons
Addressed: A Monsieur / Monsieur Le Docteur / francklin à Paris
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