From — Richelot (unpublished)
Rennes le 1er. 8bre 1780.
Monseigneur,

C’est un françois attaché au service de L’honnorable Congrés, Envoyé en france dans le parlementaire expedié aprés la prise de Charles-town qui vous expose sa situation et ses malheurs. Fait prisonnier de Guerre jusqu’a cinq fois dont 4 fois en mer et la 5e a Charles-town, Jai essuyé plusieurs maladies trés graves. Mon temperament epuisé de plus en plus par la misere excessive et généralle qui s’est fait ressentir au siege de charles-town et par la disette de toutes Especes de vivres je me suis trouvé trés mal pendant la traversée et a mon arrivée en france la nouvelle maladie dont j’ai eté attaqué m’auroit seul empesché d’executer le projet que j’avois formé de me rendre sur le champ a Paris pour vous faire ma cour et y prendre vos ordres. Mais un autre obstacle egalement difficile a vaincre s’opposoit encore a ce voyage. Etabli Dabord a Saint Domingue ou j’avois rassemblé mes facultés, je Les avois ensuite transportées dans le continent. J’y faisois faire quelque commerce depuis que j’etois attaché au service du Congrés mais tout le fruit de mes travaux a eté enlevé par les ennemis dans les differentes circonstances ou je me suis trouvé. Arrivé a Rochefort on m’a compté une modique Somme de soixante Livres pour me rendre a Rennes et il ne me reste que quelque Papier continental qui n’a pas cours en france.

Dans ce denuëment de toutes choses, permettés donc, Monseigneur, que cette Lettre me remplace dans ce moment aupres de vous. Il s’agiroit dabord de me faciliter les moyens de conservér a mon Papier monnoye la valleur que l’honnorable Congrés lui a donnée. Je ne sçu que le 20. Juin dernier jour du depart du Parlementaire La resolution prise de rappellér le papier pour y en substituér dautre d’une forme differente affin de remediér a L’abus de la falsification de cette monnoye que les anglois ont contrefaite. Depuis il m’a eté impossible de savoir au juste si cette resolution existoit réellement et de prendre les mesures qu’Elle indiqueroit. Oserois-je, Monseigneur, vous priér de me tracér la marche que je dois suivre pour que ce reste de proprieté ne devienne pas inutile dans mes mains.

La durée de mon sejour en france que les maladies et ma position actuelle m’empeschent d’abregér autant que je le desirerois pourroit etre un obstacle a mon avancement si elle etoit mal interpretée par mes superieurs, s’ils jugent de mes motifs par la conduite que j’ai tenu sous leurs yeux Je puis me flattér de n’avoir rien de semblable a craindre; quinze années d’un service irreprochable tant en france qu’en amerique et dans le continent sont un titre et supposent une experience dont il m’est, je crois, permis d’invocquer l’aventage a trente deux ans. Cependant mon retour dans le continent emanant de la Cour de france a Votre sollicitation feroit infiniment plus pour mon avancement que touts mes efforts reunis. Je vous supplie, Monseigneur, de le demandér pour moi, de vouloir bien me donnér les avis dont J’ai besoin pour conservér a mon papiér sa valleur numeraire, et de me marquér quelle Espece d’avancement vous pensés que la nature de mes services de mes malheurs et de mes pertes pourroit me procurer dans le continent. Je ne saurois concevoir de trop flateuses Esperances si vous vouliés etre mon protecteur et si je puis mi presentér de nouveau sous vos auspices. Rien n’egaleroit ma reconnoissance si ce n’est les sentiments du proffond respect avec lequel je suis Monseigneur Votre trés humble et trés obeïssant serviteur

Richelot
Capitaine au service des Etats unis
de l’amerique ruë St. Dominique Maison
des freres de la Charité a Rennes en
Bretagne chés mademoiselle Clisson.
Endorsed: Richelot, Rennes le 1. Oct. 1780.
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