From — Cavallier and J.J.S. Nicoud (unpublished)
Palerme, le 22e Juillet 1779
Monseigneur,

Epris d’une juste admiration pour un peuple vertueux qui a sçu secouer le joug du despotisme, effrayé par le tableau de l’Europe vicieuse et rampante, j’ai pris le parti de la fuir et d’aller chercher chés les généreux Américains une patrie dont les maximes entretinssent la pureté et l’energie de mes sentimens. Quoique mon coeur et ma raison applaudissent à une résolution à laquelle ils ont donné lieu, j’ai crû qu’il etoit de mon devoir de la soumettre aux lumieres de l’illustre Docteur Francklin, pour la rejetter s’il la désapprouve et pour m’y livrer s’il daigne y applaudir. Dans ce dernier cas, je suis persuadé que non seulement Votre Excellence voudra bien me faciliter les moyens d’executer mon projet, mais que ses soins s’étendront meme jusque par delà les mers. Inciter mes honnettes et eclairés concitoyens, tacher de m’attirer leur estime, cultiver le coin de terre confié à mes soins pour pouvoir un jour restituer avec usure au Gouvernement ses généreuses avances voila le but que je me propose, et je le considère comme le seul qui puisse faire gouter à l’ame cette douce paix presqu’ignorée dans nos climats corrompus.

O vous donc sage et savant Représentant des illustres Etats Unis de l’Amérique, daignés accueillir mes prieres en m’applanissant le chemin de votre heureuse patrie, donnés lui un Citoien de plus certainement elle vous en saura gré un jour. ~y2

Il est tems de dire à Votre Excellence pour qui elle s’employera. Je suis actuellement agé de 27. ans, associé de la Maison Gamelin freres et Cavallier de Palerme, et si je ne cherchois que les richesses, je pourrois peut-etre en continuant ma societe (dont le terme est en May prochain et qu’il ne tient qu’a moi de renouveller) en acquérir et jouir ensuite de leur faux brillant. Mais une ambition plus noble m’entraine ailleurs et me fait cesser detre Negociant si vous consentés que je devienne Cultivateur.

La reponse dont Votre Excellence daignera m’honorer formera la base de ma conduite à venir.

Rempli du plus profond respect j’ai l’honneur de me dire Monseigneur De Votre Excellence Le très humble et très obeissant serviteur

Cavallier

La personne qui aura l’honneur de présenter cette lettre à Votre Excellence est un des correspondans de ma societé; Il ne sait rien de son contenu, et il m’a paru d’autant plus inutile de l’en instruire qu’il auroit pû en parler à mes associés que se seroient crûs ensuite autorisés à rompre nos liaisons auxquelles la prudence me défend de mettre fin avant de savoir ce que pense Votre Excellence sur le plan que j’ai l’honneur de lui mettre sous les yeux.

[In another hand] Mon ami m’ayant communiqué sa lettre, je prens la liberté de vous adresser les memes voeux que lui. Citoien de Geneve, je chéris l’honneur et la liberté; Agé de 28. ans, mes ~y3 bras peuvent etre utiles longtems à la patrie qui m’adoptera pour Citoyen. Mon etat est le commerce et je m’en occupe en qualité de premier commis dans la Maison de Messieurs Grano Vierne et Compagnie de cette Ville auxquels je serois faché de laisser pénétrer ma résolution avant de connoitre la maniere dont Votre Excellence daignera l’envisager.

J’ai l’honneur detre avec un très profond respect Monseigneur De Votre Excellence Le très humble et très obeissant serviteur

J. J. S. Nicoud

Endorsed: Cavalier et Nicoud 22. Juillet 1779 [Also in margin] M Caccia Banquier rüe St. martin vis avis celle aux ours.
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