From — de Lafosse (unpublished)
Bruges. 7. Mars. 1783
Monsieur

J’attends la premiere occasion pour paser en pensilvanie avec ma famille. Oûtre mes motifs de pouvoir sous l’heureuse influence de la Liberté, former mes enfans au travail, à la Sobriété et à la vertu, j’avois encore le projet (quem si non tenuis, magnis tamen excidit ausis) d’un Code de Loix, où tendant à la perfection, je n’aurois point été gêné par les motifs relatifs qui ont fait dire à la Sagesse divine qu’elle a donné au peuple Juif des loix qui ne sont pas bonnes à Solon qu’il a donné aux atheniens les meilleures loix qu’ils fussent capables de recevoir, et par ceux qui ont occasionné la partialité des loix de Mr. Locke et en prenant Mr. pen pour modèle dans le But qu’il se proposoit mais en m’ecartant de la Rigueur de quelqu’unes de ses loix civiles, et de toutes ses lois criminelles, j’aurois établi qu’on peut plus facilement former un peuple à la vertu par des tempéramens doux, de bonnes maximes philosophiques, morales et religieuses, que par des moyens honteux et violents, comme le vol à Sparte, l’ostracisme à athenes, l’insurrection en Crete, le crime contre nature à Thebes, l’inquisition à Venise, la licence effrenée de la presse et des partis en angleterre etc. etc. etc. Quoique l’allemagne, la Suisse et la hollande ayent à beaucoup d’égard perfectionné la Confédération politique des anciens, il me reste encore bien des abus à demontrer, et bien des changemens à proposer. Un peuple libre devant connoître l’esprit de ses loix, j’aurois en suivant la précision qui convient à la majesté du sujet, particulier[ement] motivé et commenté le texte.

Tel étoit mon projet; mais j’apprends avec la plus grande satisfaction que vous vous proposez par l’éxécution du même projet à mettre le comble à votre reputation litteraire et aux services que vous avez rendus à votre patrie. Je renonce donc à une entreprise dans laquelle l’amour de l’humanité que j’aurois de commun avec vous ne pourroit lutter contre la superiorité de vos lumieres. Je me borne à desirer de pouvoir vous être utile dans ce vaste dessein, et laissant à votre genie de saisir en grand l’ensemble d’un tout bien organisé, pouvoir lui éviter la partie des details, des distinctions et éxeptions qui deriveront de la précision de la loy.

J’ay l’honneur d’être avec Respect Monsieur Votre très humble et obéissant serviteur

Delafosse
chez Me. hachez Maitre Tailleur
Rue Croestraete à Bruges en flandre
Addressed: A Son Excellence / Monsieur Le Docteur Franklin / embassadeur des états unis à la Cour de / france / à Paris
Endorsed: Delafosse Bruges 7 Mars 1783.
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