Antoine-Felix Wuybert to John Paul Jones (unpublished)
A Bord du Serapis Vaisseau de guerre americain 10. octobre 1779
Mon Commandant,

Je saisis, avec un plaisir inexprimable, l’occasion de Vous presenter mon respect et de Vous demander des nouvelles de Votre Santé à la conservation de laquelle je m’interesse, pour Le moins, autant que qui que ce soit.

Depuis deux Jours que Vous etes absent nous avons reçû ici quelques Visites de la part de quelques MM. hollandais, rien d’absolument extraordinaire a bord, que quelques querelles entre le français et les matelots que J’appaise et punis autant que les circonstances me Le permettent et surtout en l’absence d’un chef dont je veux menager Le repos et la tranquilité n’ayant que trop eû d’Inquietude pendant toute la campagne. Actuellement tout Va à merveille depuis hier matin et dès que vous serez de retour, j’auray l’honneur de Vous rendre compte des desordres commis, et la maniere dont je me suis comporté pour y remedier tel et comme la Sagesse et La politique me l’ont suggeré.

Après m’être informé de Votre Santé, Mon Commandant, et Vous avoir rendu compte à peu près de ce qui me regarde; Vouderiez-vous bien avoir la Bonté de Vous occuper de ma situation qui a beaucoup changé, periclité meme depuis prés de trois ans, que Jay eté arraché de la maniere la plus injuste et barbare, au Corps du genie continental auquel J’appartiens depuis le commencement de ~y2 cette guerre. Jay toujours beaucoup à coeur la cause de l’amerique, parcequ’elle est noble et glorieuse, mais, Mon Commandant, Je ne suis guêres à meme de m’exerçer dans une branche militaire qui m’est tout a fait inconnuë, comme de commander la troupe, de l’Exercer, la discipliner etc. Il serait beaucoup mieux pour moi et pour mon plus grand avancement d’Etre à mon corps pour y reprendre mon office d’Ingenieur, qui avec l’artillerie est Le plus beau de tout l’art militaire. Tous mes cadets avancent et se distinguent, tandis que Je reste dans l’oubly et que Je passe presqu’inutilement mon tems à un office qui m’est Etranger sur un Element le plus contraire à ma Santé deja trop alterée par les rigueurs d’une trop Longue prison sur mer et sur terre entre les mains des “Britannos hospitibus peregrinisque feros.”

Si Vous Vouliez, mon Commandant, avoir quelque Egard à ce que Jay l’honneur de Vous representer; Vous conviendrez avec moy, que, non seulement Je Vous suis trés-peu nécessaire, mais aussi qu’il convient que Je repasse au plutôt en Amerique, où me renvoye Son Excellence M. le Dr. franklin qui a eû la Bonté de m’accorder, à cet Egard, un passeport et une Lettre addressés en may dernier au Capitaine Landais pour me transporter et me remettre à mon Service d’Ingenieur en Amerique.

L’on m’a assuré, Mon Commandant, qu’il y a à Amsterdam 2. Navires americains dont un pour Boston. Il y a en outre plusieurs Vaisseaux hollandais qui Vont droit à St. Eustache et à Curaço colonies hollandaises où il y a des agents du Congrés. Cette derniere Voye, selon moi, est la plus sure, parceque l’hollandais ~y3 est neutre. Il y a dans la rade où nous sommes un autre Vaisseau hollandais, La Dame-Catherine, qui est a attendre Les Vents favorables pour aller à Curaço.

Comme J’ose compter sur Votre Bonté et Votre Equité, et que depuis Avril dernier Je suis expedié pour aller rejoindre mon corps; Vouderiez-vous bien avoir la complaisance de Vous occuper de moy pendant un Instant pour me procurer un passage en Amerique sur Le Vaisseau que Vous Voudrez et croirez le plus convenable tant pour ma sureté contre l’Ennemy que relativement à mes facultés qui sont trés-modiques.

Ne serait-il pas possible, Mon Commandant, et en deduction sur les appointements qui me sont dûs depuis prés de 3. ans, d’obtenir une Somme quelconque pour me procurer tous Les Instruments, papiers, couleurs etc. nécessaires, articles infiniment chers en Amerique et qu’on ne peut pas quelques fois se procurer. Pour peu que cette demande fasse des difficultés, cessez de Vous en occuper; cependant il est du dernier ridicule qu’un Ingenieur se presente depourvû d’Instruments nécessaires à la Levée des cartes reconnaissance etc. Que dirait-on d’un officier qui voudrait faire son service qu’avec ses ongles et ses dents?

Maladroitement et à tort Vous a-t-on envoyé le detail des tués, blessés et vivants des deux Vaisseaux la Bonhomme Richard et le Serapis est aussi mauvaise forme et Ecriture. L’on m’a demandé le detail de la troupe. Je l’ai donné, mais en brouillon, et ce n’est pas ma faute s’il n’est pas en meilleur ordre, parce qu’on Vous l’a depeché sans ma participation. ~y4

Je Vous souhaite une continuation de la plus belle santé et Les plus heureux succés dans vos negociations relativement à Nos prisonniers, blessés etc.

J’ay l’honneur d’Etre avec Les Sentiments d’Estime la plus distinguée et Le devouément Le plus respectueux, Mon Commandant, Votre trés-humble et trés-obeissant serviteur

Lt. Col. Wibert
Commandant des Volont. Americ.
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