C’eut été pour moi une satisfaction bien douce de pouvoir vous presenter mon ode sur la paix. Cétoit dans l’espérance de jouir de cet honneur, que, malgré une indisposition causée par de longues veilles, j’ai fait le voyage de Passy. J’avois encore envie de vous communiquer quelques strophes que le Censeur de mon ouvrage m’a fait supprimer, comme trop hardies, selon lui; mais qui, au jugement de plusieurs sçavants à qui j’en ai fait part, ne sont pourtant que dans la plus éxacte vérité. Je vous les envoye cy-jointes; et je laisse à votre éxpérience à décider si j’ai été emporté trop loin par mon enthousiasme et mon admiration pour un peuple dont votre prudence à si heureusement défendu les droits et rétabli la liberté. Dans le supplément que je vous envoye, Monsieur, j’ai cru, pour ne point choquer votre modestie, devoir omettre une strophe qui vous regarde personnellement. Mais en même tems j’ai cru pouvoir la joindre aux autres dans la distribution que j’en ai faite aux gens d’esprit. La supprimer entièrement, c’eut été manquer à ce que je dois au témoignage de ma Conscience. Puisse ce foible hommage, que je rends à votre mérite, vous prouver avec qu’elle éstime et qu’elle vénération je suis, Monsieur, Votre trés humble et trés obéissant serviteur