Hé vraiment oui, mon bon papa, jetois dans la frayeur que votre attraction ne l’emporta sur la mienne quand mr LeVeillard est arrivé, mais fort heureusement, comme il vous le dit, je n’avois pas encorre suivi votre conseil, il y a lieu de croire que le chagrin de votre départ et la crainte du sien mont préserve de cette fausse démarche, sans ces motifs, avec ma vivacité naturelle et le grand fond de coqueterie que vous me connoisses, je n’aurois pas tant tardé, d’apres votre approbation, a prendre un consolateur, graces donc a ces circonstances il m’a retrouvee comme il m’avoit laissée, tres triste de votre départ, regardant votre portrait a tous les instant du jour, et ayant pour resverie favorite le projet de vous faire une visite. Cette resverie se fait quelquefois tout haut, ma fille veut en estre et si le fils etoit present, il diroit et moy aussy, il est desolé de votre départ quil n’a su que tres tard a cause d’une lettre perdue.
Je possede, depuis hier seulment, votre table elle a une vertu qui m’atire aupres d’elle; je p[asse] la main desus, je la regarde, cela me fait un c[hagrin?] qui me fait plaisir.
Jembrasse les deux petits fils, ils me feroient grand plaisir s’ils me procuroient l’occasion de leur estre bonne a quelque chose.
Adieu mon papa, donnez nous de vos nouvelles et soyez sure de la tendresse et de la cincerité de mon amitié.