Si des sujets francois, que vous paroissés honorer d’une façon de penser favorable, pouvoient etre des instruments a l’etendüe de votre genie et de vos vües dans la consistence et morale et phisique que vous donnerés aux etats generaux des provinces unies; pour leurs plus grand lustre, leurs plus haute prosperité, et l’admiration de l’univers, vous n’auriés qu’a disposer de ceux qui pourroient avoir le bonnheur de vous etre de quelque utilité. Consequemment j’auray l’honneur de proposer a votre illustrissime excellence, (avec l’agrement de mon auguste souverain, dont l’affection et la bienveuillance envers leurs hautes puissances me doivent etre un sûr garand, et sur les pouvoirs dont elles vous ont revetues avec autant de justice que de sagesse,) l’acceptation d’une levée d’hommes dans l’etendüe du royaume, pour en former un corp qui puisse, sous votre ameniteuse (?) direction, faire en amerique pour ll.hh.pp. tous les services dont son enciclopedique composition pourra le rendre capable.

Mon projet est de la rendre incomparable par le choix que je feray ou mes praeposés, de gens robustes et courageux, accoutumés aux travaux et a la fatigue, individuellement adaptés a toutes sortes d’arts metiers industries et connoissances necessairement relatives a toutes les parties, qui peuvent interesser et constitüer l’ordre public, et enfin faits pour etre employés ensemble et separement a tous les usages auxquels ils pourront etre destinés.

Sur cette notice peu detaillée, pour ne la pas rendre volumineuse, vôtre gratieuse excellence n’aura qu’a statuer; si cette aquisition pour ll.hh.pp. peut etre considerée avec quelques avantages, je developeray mon plan, dans tout son entier, et oseray vous repondre de son execution, telle que vous pourrés la desirer, par tout le zele et l’ardente activité que j’y mettray.

J’auray l’honneur de vous avoüer ingenuement que ce ne sera pas mon coup d’essay, que dans semblables commissions, sous feu monsieur le marechal de belle isle, j’ay eu de grands succés, et que je crois pour cette entreprise, si vous l’agrées, réüssir encore mieux par les facilités et secours que j’attends de la part du ministere, et des circonstances actuelles, ainssy que de la bonne volonté nationale à sortir de l’inaction, pour voler dans un champ ouvert a leur entreprenante capacité.

Tels sont les premiers materiaux pour la construction de ce susdit corp, les seconds pour son tactalique (?) regime j’espere les trouver dans les instructives connoissances, tant theoriques qu’experimentales qu’une assidüe application dans bien des genres aura pû me faire aquérir, surtout dans l’art militaire.

J’ay servi dés mon enfance avec la plus forte vocation et je pourrois dire avec distinction, si je m’enoncois d’aprés telle assertion de tous les officiers generaux qui m’ont commandê et inspecté (ce que je puis encore faire attester a votre excellence par ceux qui existent, notament les marechaux de broglie et de segur.) Pardonnés moy, Monseigneur, cette parenthese, elle n’est que pour etablir votre confiance a vouloir mettre en oeuvre, aprés que vos mains habiles les auront polis, les susdits materiaux que je puis vous offrir, et a vouloir leurs donner toute la connexité qui leur sera necessaire, si vous en voulés faire un employ.

Je suis avec respect de votre illustrissime excellence Monseigneur le tres humble et tres obeissant serviteur