From Gerard d’Auzéville (unpublished)
Le 9 avril
Monsieur,

Vous vous rappellez peut-être que j’ai eu l’honneur Le Vingt quatre du mois dernier de me presenter chez vous avec une Lettre, dans laquelle je vous ai exposé qu’une chaîne d’evenemens, aussi funestes qu’inévitables avoient ravi aux auteurs de mon Etre, le patrimoine qui faisoit tout leur bien, et que je cultivois moi même: que n’aiant plus de ressource, je vous priois de me procurer en Amerique des defrichemens.

Vous m’avés fort bien accueilli, Monsieur, et Vous m’avés promis que j’obtiendrois cent Arpens de la Republique, moiennant cinq Louis d’or; mais qu’il falloit faire quelques Depenses, tant pour Le passage, que pour se precautionner des instrumens de L’agriculture, et subsister jusqu’a la premiere recolte.

J’ai cherché parmi mes connoissances, a peu prés L’argent qu’il me falloit pour cette entreprise: mais la fortune qui m’a depouillé de tout, ne m’a pas Laissé un veritable ami. N’importe, j’ai puisé dans les disgraces qui m’ont assiegé dès le Berceau, le courage de les combattre. Une Ame audessus des revers du sort, et une santé robuste mise trop souvent à L’epreuve, voila les biens qui me restent.

Si les malheurs d’un Citoïen Sans espoir, si les desastres de sa famille S’arrachant elle même de ses propres foyers pour en faire le sacrifice a des engagemens d’honneur, si ces calamités vous touchent, secondés par quelques avances le desir que j’ai de me fixer sous L’administration de L’Amerique independante. Si vous m’en facilités les moiens, je me soumettrai, Monsieur, a toutes les conditions que vous voudrés m’imposer pour vous en procurer la rentrée sur les revenus provenants de mes exploitations dans ce Climat.

Je suis avec un profond respect, Monsieur, Votre trés humble et trés affectionné serviteur

Gerard D’auzéville

Notation: Gerard A’auzeville 9 ap. 79
632016 = 029-288a001.html