Louis-Guillaume Le Veillard to William Temple Franklin (unpublished)
Passy 21 avril 1786

J’ay une humeur de Dogue, mon cher amy, les lenteurs et les contradictions que j’éprouve pour vos commissions me mettent en colere, a la reception de vostre lettre du 18 janv. j’envoye chez le Mazzards comme je vous l’ai mandé, ce malheureux la ne veut pas faire vos souliers pour le surlendemain mais il donne parole de les porter tout emballés six jours après chez Mr. Grand, je pars tranquille pour aller a Dreux a l’arrivée de mon beaufrere revenant de l’Inde, jy reste 15 jours, a mon retour Mr. Grand me dit qu’il na pas vu les souliers, je renvoye chez Mazzard qui donne de mauvaises excuses et ne peut malgré toutes les instances de la (?) donner vos souliers que 8 jours après, outré d’impatience j’ay ete avant hier chez luy a son cinquieme, je l’ai bourré d’importance et je dois avoir au plus tard demain son ouvrage, a tout hazard jen ai commandé une paire de plus que je garderai pour vous reserver ou a moy le moyen d’en faire faire a lavenir par un autre si nous le voulons.

Mr. De la Valette ne part que le 1er juin, je compte vous envoyer par luy le chien, les souliers et le réste des livres.

Mr. Berard a qui jai écrit a l’orient si tost vostre lettre reçue pour les arbres embarqués sur le The fame; ces messieurs ont eu l’attention de les garder pres d’un mois sans les éxpédier de sorte qu’ils sont arrivés ici garnis de feuilles, a l’avenir adressez plutost vos envoys a Mr. de la Vaisse ou a Mr. Gérard, ils sont beaucoup plus attentifs.

A l’égard de vos chevreuils, mon cher amy, c’est bien une autre histoire, dans la crainte que le depart des vaisseauxqui pourroient s’en charger au havre n’en partissent trop vite pour qu’on eut le temps de les y faire passer, j’ecris le 2 de mars a Mr. le Couteux de Canteleu pour le prier de permettre que je les luy envoyasse pour les garder [?] a Canteleu jusqu’a ce que l’occasion qui ne pouroit pas tarder se presentat pour les faire partir du havre il ne ma repondu que le 15 avril et j’ay reçu sa lettre le 18, elle m’annonce un Navire qui doit partir le 30 pour philadelphie et me prie d’envoyer les chevreuils a Rouen. Je vais sur le champ a Paris, je fais marché avéc la diligence a raison de 20 l.t. par chevreuil, et son départ est fixe au samedy 22, jen envoye sur le champ l’avis a Mr. Le Roy, je vais hier jeudy 20 diner avéc luy chez Madame helvetius et il me dit ce que contient sans doute la lettre de luy cy joingte, qu’il ne réste plus que 3 chevreuils, qu’ils sont malades, qu’il serait deraisonnable de les faire partir, qu’il doit en faire prendre de petits qu’on elevera avéc soin a la menagerie et qu’ils partiront en séptembre, vous concevez que tous ces contretemps me fachent beaucoup, mais il faut se soumettre a la nécéssité.

Ne m’écrivez donc plus si precipitament, mon cher amy, commencez vos lettres dans un moment ou vous n’avez rien a faire, relisez les miennes, je vous y demande beaucoup de choses auxquelles vous n’avez point repondu, qui vous regardent ou le Papa et par conséquent qui m’intéréssent beaucoup, vous me remettez dans toutes vos lettres a la suivante, il vous presse toujours et il y a 9 mois que vous estes parti. Vostre papa est [tout aussi] paresseux que vous, car je n’ai pas recu de ses nouvelles depuis le 20 8bre il n’a pas repondu a deux lettres du Duc de la Rochefoucauld que je luy ai envoyés, et a plusieurs articles de mes lettres.

Le Procès du cardinal se poursuit toujours, comme plusieurs personages nouveaux sont impliqués dans la procedure je ne sais quand il finira, il paroit cependant quil parviendra a prouver qu’il na été qu’une dupe et un imbecille, réste a savoir s’il est permis de l’éstre a ce dégré la.

Tous les miens vous aiment comme quand vous estiez ici et vous embrassent nos amis ne vous oublient point et moy je suis a vous pour ma vie

Le Veillard

N’allez pas croire que les contradictions que j’éprouve pour vos commissions me fassent désirer de n’en estre plus chargé, au contraire ne craignez point de m’en donner, les contretemps me piquent mais ne me découragent point et j’y mettrai tant de suite que je parviendrai a les vaincre.
Addressed: A Monsieur Monsieur Williams Temple franklin A Philadelphie acheminé et recommandé à Mr. penet par Leurs très humbles serviteurs Ruellan et Co.
Endorsed: Recd. 16 Augt. 86
643063 = 044-u076.html