J’ai eu l’honneur de vous ecrire, il y a quelques jours, pour vous prier de me permettre de me presenter à V.E. Par la dite lettre, je vous priai aussi de vouloir ben accepter mes services, que j’offrois pour la Republique des Etats unis. Craignant, que ma lettre, ne soit pas parvenue jusqu’à vous, Monseigneur, je prends la liberté de repeter dans celleci, ce que j’ai eû l’honneur de vous ecrire anterieurement. Je suis né en Turquie, de famille distinguée, elevé et eduqué par des bons Precepteurs, et je me flatte d’avoir fait de progres. Ayant ensuite, et aprés bien de voyages en affrique, et en asie, servi à la derniere guerre entre la Porte, et la russie, et n’ayant pas obtenu à Petterbourg la recompense, que je croyais düe à mes services; je quittai cette ville là, avec le service, et je fus à Londres pour y chercher service. Mais la personne, sur laquelle je comptois, ne pouvoit rien faire en ma faveur, non plus que pour lui meme. Cette Personne, est Mr. Elphinston, jadis contr’admiral de la Flotte russienne.

En consequence de quoi, je vins ici à Paris, où j’ai beaucoup de connoissances, et d’amis. Par moyen de ceux ci, je fus presenté à Mr. le Marquis de Castries, qui eut la bonté de s’entretenir avec moi plusieurs fois; et m’a ensuite promis de m’employer au service du Roi. A present, me voylà dejà six mois à attendre ses promesses: ce retardement m’etant beaucoup nuisible, et dispendieux, et craignant de plus un plus long retard, j’ai conçu l’esperance de obtenir quelque service chez la Republique des Etats unis. Me flattant de pouvoir etre utile, et me connoissant capable de rendre des services importans; c’est pourquoi, que j’ai pris la liberté de m’adresser à V.E. pour vous prier de vouloir bien agréer mes offres; et dans le meme tems de m’accorder l’honneur d’un Entretien avec vous, Monseigneur. A cette demarche, je fus conseillé par des personages respectables, et de la premiere condition de Paris, qui vous donneront, quand il vous plaira, toutes les plus minutes informations de moi.

Je vous supplie donc de nouveau, Monseigneur, de vouloir bien me permettre de me presenter à vous: peut etre, que vous meme, me trouverés a propos pour employer un homme, qui demande votre Protection: et qui à envie de sacrifier le reste de ses jours au service de la Republique des Etats unis.

En attendant, que V.E. me fasse l’honneur de me faire savoir ses intentions, et ses ordres: je vous supplie de me permettre celui d’etre avec le plus profond respect, et la plus parfaite estime, et consideration Votre tres humble, et tres obéïssant serviteur