Louis-Guillaume Le Veillard to William Temple Franklin (unpublished)
Passy 8 7bre 1786

Mr. Le Roy hier, chez Madame helvetius, m’a annoncé mon cher amy, la triste nouvelle d’une seconde mortalité parmi les chevreuils, malgré tous les soins et l’intelligence de leurs precepteurs, 4 ont péri, les trois autres sont malades, et entre nous Mr. Le Roy me paroit un peu rebuté. J’esperois qu’il me feroit de nouvelles promésses pour l’année prochaine, il ne ma parlé de rien et je n’ai pas osé luy faire de demande, d’ailleurs nous n’aurions pas eu d’occasion, Messieurs le Coulteux et Ruellon ne m’en ont point annoncé; je suis vraiment faché de cette contradiction, et Mr. Jefferson l’est aussi; j’ay eu l’esprit de deviner que l’homme que vous desiriez pour accompagner les bêtes, elles ne partant pas, vous devenoit inutile, et je ne l’ai point arrêté. 20 7bre. Mr. Jefferson s’est demis avant hier le poignet de la main droite en voulant sauter par dessus une barriere du petit cours, le poignet est bien remis mais il a beaucoup souffert et je ne crois pas qu’il puisse ecrire d’ici a un mois.

Un Mr. Le Coulteux va faire un etablissement en pensylvanie, il y mene une jeune femme qu’il vient d’epouser, elle est fille de Mr. Clouet regisseur des poudres, receveur des impositions de Paris et fort lié avéc Mr. Dailly. Je ne sais si elle est jolie, vous le verrez, et je m’en informerai par interest pour vous.

Mr. Williams est encore venu ces jours cy, je ne conçois pas que vous n’ayez pas encore recu son envoy d’arbres ecrivez moy sur cet objet un article que je puisse luy montrer.

Mr. de Beaujon n’est point encore mort, mais Mr. D’harvelée, ancien garde du tresor royal riche a beaucoup de millions, cousin germain de Mr. Paris qui n’en herite point est mort Lundy au soir. Mr. Paris a un legs de 60.000 l.t..

Madame de Malachel a fait tres habilement un enfant mort, c’est a dire pourtant, il est mort depuis qu’elle la fait, et elle la mis au monde après l’avoir porté 7 mois, elle en est fort triste, et dit qu’il n’y a qu’une mere qui puisse sentir son chagrin, pour nous qui ne voyons aucun rapport moral entre elle et ce morceau de chair, nous croyons que c’est a peu près comme si on regrettoit une garderobbe, elle dit aussi que ce n’est pas sa faute; mais elle avoit 5 semaines auparavant risqué avéc sa soeur de passer a la suite du Roy d’honfleur au havre sur un petit batteau, elles ont été prises par un grain tres violent, penetrée de pluye et d’eau de mer, tres malades, elles ont vomi et elles ont courru les plus grands risques.

Mandez moy ce que devient Mr. Williams, est il toujours en amérique? Sa femme l’a telle été trouver? Sont ils heureux, il y a mille ans que je n’ai recu de nouvelles du grandpapa.

Les jambons sont enfin arrivés il y a trois jours 3 ou 4 mois après l’annonce de leur arrivée au havre; je vous en remercie et le grandpapa, quoyque les miens ne me soyent pas parvenus, ils ont été pris ou égarés, Madame Grand a voulu absolument nous faire present d’un des siens.

Pour vous payer en politique, la mort du grand Roy de Prusse n’a produit encore aucun changement, les hollandois sont tres mécontents du stathouder, qui n’est soutenu que par Utréc, la gueldre et la Zélande et qui pourroit bien perdre toute son autorité ou au moins une grande partie. Mr. de Maillebois est revenu a Paris comme il en etoit parti, le Rheingrave de Salm [?] paroist avoir la confiance des hollandois et de la france.

Passy n’est plus le Passy de vostre temps, il sera desert cet hiver, Mr. Dailly le passera a Paris, Mr. de la Varenne est lieutenant de Reg. de Metz, nous serons éxactement seuls, je suis fâché de l’absence de Mr. Dailly, quand a vous, mon cher amy, je ne me consolerai jamais de la vostre, tous les miens pensent de même et vous embrassent tendrement

Le Veillard

23 7bre
J’ay recu hier, mon cher amy, vostre lettre du 14 aoust et je vous remercie beaucoup de la demarche que vous avez bien voulu faire pour moy auprès de la société philosophique de Philadelphie, quoyque fort peu digne de cet honneur je le desirois beaucoup, je ne puis guere estre connu de cette savante compagnie que par quelques memoires imprimés parmi ceux de l’academie et je sens que je ne dois qua vous et au grandpapa l’opinion que vous avez désiré qu’elle prit de moy, voulez vous bien vous charger de mes respects, et de mes remerciements pour elle, comme je desire infiniment de luy estre utile je me chargerai volontiers de toute espece de correspondance avéc elle pourvu qu’elle me permette de repondre en francais. Instruisez moy des devoirs qu’elle prescrit, faites moy je vous prie l’emplette de ses transactions, et envoyez moy ses statuts et la liste de ses membres.
15 8bre 1786
J’ay ete hier a Seve chez les Williams, et nous sommes convenus d’un nouvel envoy par le Paquebot qui suivra celuy qui doit partir après celuy du 1er du mois prochain, il est encore de trop bonheure pour arracher les arbres, il contiendra la même chose que celuy qui s’est perdu, lorsqu’ils seront bien emballés il nous avertira Mr. Grand et moy pour les envoyer chez luy, ou pour les prendre en passant sil faut les envoyer a l’orient, mais Mr. Jefferson presume qu’a l’avenir les paquebots partiront du havre. Williams m’a dit qu’il avoit envoyé ses arbres de Rouen a l’orient avéc une lettre au capitaine du Paquebot pour luy recommander de les prendre pour vous, qu’il n’en a eu aucune nouvelle, mais qu’ayant ete aux informations, on luy a dit qu’il ne se chargeoit de paquets que lorsque le port etoit payé d’avance et qu’apparemment ceux cy etoient restés a l’orient, qu’il chercheroit le moyen de ravoir au moins ses caisses; ce Pauvre Williams en est pour ses arbres, ses caisses et ses frais, car m’étant opposé a cet envoy a cause de l’avancement de la saison et du deffaut d’occasions et n’y ayant consenti qu’a condition quil en coureroit tous les risques et que je ne le rembourserois que lorsque vous m’en auriez accusé la reception en bon état, il est convenu qu’il n’avoit rien a repeter [?]. Je n’ai point besoin d’argent car moyennant ce qui me restoit celuy recu      par Mr. Thierry et le benefice du change de vos louis j’ay encore a vous 220 l.t. 115 9d. et j’aurai encore a y ajouter le prix des transactions de la societé philosophique que vous voudrez bien achepter pour moy. Mr. de Jefferson a envoyé ou se charge d’envoyer les nouveaux Volumes de la nouvelle encyclopedie, et MM. Grand et Gauthier l’art de verifier les dattes, la suite de l’ouvrage de l’abbé Rozier et quelques journaux. A l’égard de vos souliers vous savez que je suis brouillé avéc l’illustre Mazzard qui ma signifié par écrit, je vous ai envoyé sa lettre, que je n’obtiendrois rien de luy, qu’il vous feroit directement ses envois vous n’avez pas d’autre moyen que de m’envoyer un vieux soulier sur lequel nous ferons travailler un artiste moins indocile. La belle madame fournier est morte et son mary a toujours autant d’esprit que lorsqu’elle étoit en vie et qu’il alloit a Passy vous faire passer agreablement deux ou trois heures. Le Pauvre Aléxandre Nairac chez qui etoit mon fils a Bordeaux est mort aussi, nous en sommes consternés, mon fils est au desespoir et j’ignore ce qu’il deviendra. Adieu mon cher amy je vous embrasse de tout mon coeur, je voudrois bien aller vous voir ce printems et rester toujours avec vous. Tous les miens, tous nos amis vous assurent de leur souvenir et de leur amitié

Le Veillard

Mr. Grand m’a dit que vostre terre des Jerseis etoit une aquisition que vous aviez faite depuis vostre retour en amérique, a til raison? Je croyois que cetoit une cession faite par monsieur vostre pere. Voules vous bien remettre l’incluse.
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