From Dominique Lefebvre Delagrange (unpublished)
A Brancourt Le 10 May 1778
Monsieur,

Cette lettre est la troisieme que je prend la liberté de vous écrire en Vous represantant Monsieur la triste et deplorable situation ou je suis Reduit ainsi que ma famille n’ayant pour tout bien qu’un Employ de 400 l.t. pour nourir et entretenir sept personnes sçavoir mon Epouse, moi, et cinq Enfants et prendre encore sur ces 400 l.t. mon Loyer, le bois, la lumiere, et le Blanchissage, de sorte que, Monsieur, il ne me reste que 12 sols par jour pour avoir du pain, du beurre, du sel et des legumes pour sept personnes, Vous Voyés, Monsieur, qu’il nous est impossible de ne pas ressentir la faim trop souvent, outre ce defaut du Necessaire a la Vie Nous sommes presque Nuds et sans linges ayant êté obligé il y a six ans de vendre mes habits mon linge et la meilleur partie du peu de meubles que j’avois afin de ne pas laisser perir ma famille par la faim a cause de la Cherté du pain dans ce tems, et meme encore aujourdhuy pour comble d’afflictions Mon Epouse et une fille sont Malades depuis quinze jours sans quil me soit possible de leur procurer aucuns secours, ce qui m’accable du plus noir Chagrin. Au nom de Dieu, Monsieur, ayés pitié de la situation deplorable d’une honnete famille de pauvres-honteux qui languis sous l’oppression de toutes les miseres de Cette Vie, et qui Reclame Votre secour pour cette fois seulement, je Vous en supplie tres humblement, Monsieur, en me prosternant a Vos pieds; si, Monsieur, vous aviés quelques doutes que le Tableau que je vous fait de ma situation ne soit pas sincere je Vous supplie, Monsieur, de Vous en informer a Mons[eigneu]r Dubrazier Prieur Curé de Brancourt qui me connoit depuis plus de 16 Ans que je suis son Paroissien, ou, a Madame la Vicomtesse De sourche qui a eüe la bonté de m’envoyer des secours l’anné derniere apres des informations quelle a faite a mon dit s[ieu]r Prieur Curé, mais je n’oseroit plus rien demander a Cette Dame.

Daignés, Monsieur, au Nom De L’Etre-supreme m’accorder quelques secours quelque petit quil soit, cette Etre-supreme Vous tiendra compte de Cette Charité qui ne peut être faite a qui que ce soit qui en ait autant besoin que Moi, je prieray Le seigneur ainsi que ma famille jusqu’au dernier Moment pour la pretieuse Conservation de Vos jours et qu’il Vous accorde, Monsieur, des jours Longs et heureux ainsi qu’a Monsieur Deane, et Monsieur De Lée Vos illustres Confreres a qui jai l’honneur d’ecrire par ce meme ordinaire.

Jai lhonneur d’être avec le Respect le plus profond, Monsieur, Votre tres humble et tres obeissant serviteur

Delagrange
Receveur Des fermes a Brancourt, par
St. Quentin
Addressed: A Monsieur / Monsieur franklin Deputé Des / Etats Unis De L’amerique septentrionale / En son hôtel.
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