Le 13 Mars 1783.
L’Etat d’instituteur et de Grammairien que j’exerce depuis bien
des années, exige de moi que je fasse tout mon possible pour
instruire mes Eleves sur ce qu’ils doivent à Dieu, à Notre Bon
Roi, à la patrie, à la société et à ceux qui leur ont donné le
jour. Pour mieùx réussir, je les fais paroître tous les ans à la
fin de l’année scholastique dans un Exercice public où ils
répondent sur tout ce qu’ils ont appris soit concernant la
Religion, l’histoire, la Gégraphie, soit concernant leurs auteurs
classiques: j’ ajoute à tout cela quelques Dialogues ou quelques
Drames instructifs pour les former et enhardir à parler en public.
Je prends la liberté, Monseigneur, d’adresser à Votre
Excellence, l’intitulation du Dialogue que je me propose de leur
faire apprendre et débiter pour ce tems-là: là voici; Dialogue Sur
la Guerre Anglo-Franci-Américaine glorieusement terminée par la
liberté des Mers et l’indépendance des Etats-Unis du
nouveau-monde, autentiquement reconnues le 20 janv. 1783 par
George III, Roi d’Angleterre.
Interlocuteurs
Voilà, Monseigneur, un vaste champ semé pour nous, nos neveux et
arrière-neveux: cette piéce me paroit d’autant plus intéressante
qu’elle sera historique, elle laissera à mes Eleves une forte
impression de la révolution qui vient d’arriver dans les
Etats-Unis de l’Amérique, que nous regardons comme nos bons amis
et nos fidèles Alliés.
Pour réussir dans mon projet, ou du moins, pour ne pas tomber
dans des Anachronismes, je supplie Votre Excellence de me faire
parvenir le nom à jamais immortel des premiers moteurs de cette
révolution, celui des illustres personnages qui ont composé et
composent le Congrès, celui Du Général qui a fait prisonnier le
Général Burgoine avec son armée, Celui du Général qui de concert
avec l’incomparable Washington et notre jeune héros le Marquis de
la Fayette, a Burgoinisé celle de Cornwallis, sans oublier les
moyens qu’on a pris pour amener cette révolution à sa fin.
Si vous n’avez la bonté, Monseigneur, de m’envoyer des Matériaux
solides, je serai obligé de bâtir en l’air en suivant mon
imagination.
Que Votre Excellence, Monseigneur, dont tous nos François
vantent avec raison le mérite, daigne seconder les intentions d’un
homme qui aime bien son Roi et ses Alliés, et qui suit les
Expressions que son coeur lui dicte! J’ai l’honneur de me dire
Monseigneur Le plus humble et le plus respectueux de vos
serviteurs
Trevoux Capitale de la province de Dombes, juridiction du Duché de
Bourgogne.
A Son Excellence Franklin Ambassadeur des Etats unis d’Amérique
près Sa Majesté très-chrétienne.