J’ai reçu la Lettre dont vous m’avez honoré le 26 du mois dernier. Elle nous a fait grand plaisir en nous donnant de vos Nouvelles, que nous attendions avec Impatience depuis longtemps. Cette Lettre ainsi que celle que vous avez écrite à M. Votre Pere sont arrivées assez à temps, pour qu’on ait pu envoyer les Portraits que vous desirez par M. L’abbé Morellet, que Je crois maintenant parti, et qui vous les remettra. J’ai écrit sur le Champ la Lettre que vous m’avez ordonné de faire pour le Contrôleur Général; mais M. votre pere n’a pas voulu la signer, et m’a repondu qu’il ne croyait pas devoir faire une telle demande. Vous connoissez assez sa grande Timidité dans ces occasions pour n’en être pas très surpris. Je lui en ai fait parler de nouveau ce matin par M. Williams à qui il a declaré qu’il aimoit mieux payer les Droits et reclamer vos Effets après qu’il seront arrivés à Calais ou Dieppe, que de demander d’avance une Permission pour laisser passer sans visite et sans perception de Droits vos Bagages et Effets, ce qui lui paroissoit une Demande trop vague, et même sans bornes; puisqu’on pourroit croire que sous ce Prétexte vous pourriez introduire dans le Royaume une Quantité considérable de Marchandises Angloises; et il a en conséquence refusé de faire ce que vous desirez. Je suis vraiment bien faché de ce petit contretemps, à cause du grand Embarras qu’il doit vous occasionner.

J’ai été hier voir votre Cheval. Je l’ai trouvé en fort bon état, et même Je crois mieux soigné que lorsqu’il étoit dans votre Ecurie. Le Sieur Lacy n’est point allé en voyage, comme il me l’avoit fait craindre, et il vous prie d’amener avec vous une voiture pour le Prince Joseph, si cela vous est possible.

J’ai passé aussi chez le Sieur Michau qui étoit absent, mais on m’a dit qu’il a éffectivement vendu le Whiski. Quant au Chabriolet il est toujours chez lui. Ses ouvriérs m’ont dit qu’il l’avoit laisé à 30 Louis d’or à une personne qui n’a pas voulu le prendre à ce prix, et Je lui ai fait dire que vous lui deffendiez de le donner à moins de 35.

J’aurois été bien faché d’avoir mérité le petit reproche que vous m’avez fait, de manquer à vous écrire. Je vous ai envoyé trois lettres depuis celles que vous me marquez avoir reçues. La seconde de ces trois lettres vous expliquera la Cause du retard de la premiere. Je n’ai aucune Nouvelle à vous apprendre, M. Le Veillard commence à sortir et M. votre pere se porte très bien. M. Ben et Alexandre vous font mille Compliments et desirent beaucoup votre Retour, ainsi que moi qui suis avec un respectueux attachement, Monsieur, Votre très humble et tres obeissant serviteur