From Mauger et Compagnie with note by Ethis de Corny (unpublished)
Memoire
20e Août 1781

Représente le Sieur Mauger et Compagnie résidant à Metz, qu’au mois de Janvier dernier il a été chargé par le Congrès des Treize Etats Unis d’Amerique, par la Voïe de Mr. Robert Morris un de ses Agens et Surintendant de ses Finances, de faire un approvisionement en Toiles, Chemises, Souliers et Draps de Soldats, pour le compte du Congrès. Ces marchandises sont demandées avec instance, les Troupes du Continent en aïant le plus grand besoin. Le Soussigné avoit fait des dispositions pour le depart de ces fournitures, dont l’embarquement devoit commencer à Amsterdam au mois d’Avril.

Les Navires sur lesquels ont comptoit les charger ont été pris ou tellement éloignés de leur destination par l’Ennemi, qu’il ne reste plus de Debouchés par Amsterdam, et qu’il est nécessaire de prendre la voïe de France pour expedier et faire parvenir les Marchandises dont il s’agit, aux Etats Unis, où elles sont attendues avec la plus grande impatience.

En consequence le soussigné, en la qualité qu’il agit pour et au nom des Etats Unis d’Amerique, demande les Passeports nécéssaires pour faire entrer et arriver à Brest ou à Nantes ces Marchandises en franchise. Les envois seront divisés, afin de ne pas confier à un seul navire une valeur trop considerable; mais ils se succéderont avec toute la célérité que les circonstances permettront. Il seroit bien interessant de faire le premier dans le mois de Septembre prochain, afin de profiter de l’Escorte qui pourroit partir dans ce tems pour l’Amerique Septentrionale.

Ces fournitures consistent 1º En cent cinquante mille aunes de grosse toile pour chemises draos et guêtres de Soldats; cette partie sera divisée en cinq chargemens de 30,000 aunes chacun. 2º Dix mille chemises de Soldats, en trois chargemens. 3º Neuf mille paires de Souliers, en trois chargemens. 4º Trois mille pieces de drap de Metz, dit Eternelle, pour gillets et culottes de Soldats en cinq chargemens.

Ces Passeports peuvent être délivrés pour quinze a dix huit mois, et au nom du Sieur Mauger et Compagnie Négociants à Metz, pour le compte du Congrès des Etats Unis.

Les marchandises destinées à l’equipement militaire jouissent en france de la franchise des des [sic] entrées dans l’intérieur. Les Besoins des Etats Unis sont on ne peut pas plus urgens, surtout depuis la prise des navires qui leur portoient des marchandises de la même nature que celles ci-dessus detaillées.

Le peu de moïens du Congrès fait desesperer pour lui de parvenir à faire un nouveau marché dans ce genre, si l’on ne peut éxécuter celui ci, qui n’a été conclû qu’avec la plus grande peine.

Toutes ces considerations importantes font penser, que le Gouvernement ne se refusera point à accorder les Passeports, que le soussigné sollicite au nom des Etats Unis d’Amerique.

(signé) Mauger et Compagnie

[Written in the margin] Le soussigné commissaire principal des Guerres à l’armée de Rochambeau, envoyé à l’avance dans l’Amerique septentrionale pour concerter avec le Congrès, et le General Washington, les Dispositions relatives à l’arrivée de la dite armée, Lieutenant Colonel de Cavalerie au service des Etats Unis de l’Amerique, et chargé specialement par S. E. M. Le Chevalier de la Luzerne, Mr. le Marquis de La Fayette de revenir en France, rendre Compte de l’Etat des choses et de servir le Congrès dans toutes les occasions, a l’honneur d’observer que la demande de Passeports dont il s’agit, est fondée sur ce que les Besoins des Etats Unis sont extrêmes et instans; que la prise du navire le Marquis de la Fayette ajoute à la masse de ces besoins, et aux inconveniens des retards; que les commissionaires du Congrès, n’ont plus, faute de Batimens en Hollande, que les ports de France, pour diriger leurs Expeditions, et pour les faire partir avec quelque sureté; que les Marchandises dont il s’agit viennent d’une province, reputée Etrangere, et sont destinées pour l’Etranger, qu’en leur accordant les Passeports demandés, elles n’empruntent que le Transit pour arriver à Nantes ou à Brest, qu’ainsi au moyen de l’acquit à caution, et les formalités requises, il n’en resulte pas plus de Lésion pour les droits du roy que si elles étoient expediées par Amsterdam; que cette grâce est de la plus grande importance pour les alliés de sa Majesté et diminue d’autant la Charge des Secours effectifs, qu’elle veut bien leur accorder elle même; cette négociation d’ailleurs devient utile aux Sujets du Roy dans ses provinçes étrangeres des Evechés et de la Lorraine, en leur donnant des débouchés, et consequemment plus d’Energie à cette Branche de Commerce; que faute des dits passeports, les Commissionaires du Congrès seront forcés de garder en magazin pour le Compte des Etats Unis, les Marchandises dont il s’agit, et de leur demander des dommages, Intérêts, ce qui multipliera sans utilité les besoins et les peines du Congrès; Par toutes ces Considerations reunies, le soussigné, en ses differentes qualités cy dessus énoncées a l’honneur de solliciter des Bontés de Sa Majesté pour ses alliés, l’expedition des passeports demandés.
à Paris ce 23 Août 1781

(signe) Ethis De Cornie

[At bottom of last page in BF’s hand] It appears to me that the Passports desired may be of great Utility to our Affairs, and therefore, if there be no particular Reasons that make it improper to grant them, I cannot but wish they may be obtained

B. Franklin

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