From C.J. van Mulbraght (unpublished)
Ruremonde ce 16 mai 1777
Monsieur!

Quoique jamais je n’ai pû avoir l’honneur de me récommander en votre Personnage par des Actions, qui me pourraint faire mériter votre égard, je m’apuie néanmoins sur la Générosité de votre Ame qui m’excusera, que je prens la très respectueuse liberté de vous réchercher dans un tems, que par les Gazettes je suis instruit de votre séjour à la Cour de France, à fin de négociation en faveur des Américains confédérés; et signanment dans un tel, qui parait ofrir plus que jamais, ce qu’en ces occurrences tombe sur l’inclination de Mars; car mon Ame n’a panché jamais qu’à l’idée de s’agrandir par les Armes: je n’ai jusqu’ici pû ÿ ateindre mon but. La dernière Guerre, que l’Impératrice Romaine, Reine d’Allemagne, etc., mèna contre le Roi de Prusse, je m’engagais au service de la prèmière, comme son sujet du Duché de Gueldre Aütrichienne, natif de Ruremonde, en qualité de Cadet, preuve mon Congé, a produire en cas de besoin, après avoir acompli mes études au Latin jusques à la Philosophie inclusivement, compris, qu’au dernier dégré je me fus versé tant à l’Allemand qu’au Français, oûtre que je possède le Flamand du sein maternel, ÿ jointe l’Arithmétique. Le malheur, que j’obviais dans la dite Guerre fut que j’embrassais le service Militaire, quand elle fut presqu’à sa fin, par ce que plûtôt je n’ateignis l’âge, qui me rendit capable, a porter les armes. Je vis dans la ferme confiance, que ces jours-ci le sort me sera plus favorable pour la Guerre de l’Amérique, m’ÿ ofrant en son Origine, en prènant mon récours vers votre Personnage, vous priant, qu’il vous plaise être servi de m’adopter dans votre protection puissante, et par ainsi de m’établir au service de votre République dans la même qualité, que dessus, et nommement dans la Cavallerie légère, comme je me flate, de pouvoir en cette forme me signaler le mieux, ce que par un dévoüement le plus sincère tachera de meriter celui qui ne sera jamais si ingrat, que de ne s’obliger infiniment parmi l’honneur d’être en tout respect, Monsieur! Votre très humble et très obéissant serviteur,

C.J. Van Mulbraght

p.s. La présente s’est faite à hâte au sujet du départ précipitant de son Porteur, qui prend l’honneur, de vous voir en Personne, en vuë de s’engager auprès de votre Personnage pour le service des Américains conféderés contre l’Anglèterre: il a fini ses Etudes à Cologne jusqu’à la Philosophie inclusivement, et il a aussi l’ame de faire son bonheur par les armes; il est d’ailleurs un Objet de bien de mérites, d’autant plus dans l’Ame de ceux qui le connaissent: et comme il est de telle condition, qu’il mérite d’aspirer à ce qu’un autre puisse demander, il vous prie, que vous daignez être servi, de pourvoir, qu’au dit service il soit admis aussi in qualité de Cadet. Monsieur! je me flate, que vous daignerez m’honorer de votre réponse; à ce sujet je joins-ci mon Adresse.
A l’Ecoûtête de la seigneurie de Neer, et Procureur
devant la Cour souveraine du Duché de Gueldre
Aûtrîchienne,
A Ruremonde.
627867 = 024-058b001.html