From Charles-Eléonor Dufriche de Valazé (unpublished)
à Paris hotel d’orléans Rue du parc Royal le 3 mars 1784
Monsieur

Il me reste Encore quelque chose à vous dire, il m’En Resterait bien Mille pour mon instruction, mais votre tems est précieux à trop de gens. Oui, grand homme, je surmonte l’Envie Extrême que j’ai d’aller vous faire ma Cour, Et c’Est Encore plus par Egard pour le Public, que par Respect pour vous même.

J’ai eu l’honneur de vous faire parvenir deux exemplaires des loix pénales, un que vous avez bien voulu accepter, un autre que vous avez bien voulu me promettre de faire passer au Congrès de l’Amerique. Cet ouvrage destiné à l’utilité ne peut seul remplir son but: il prescrit un nouveau Régime Pénal; mais la Maniere de l’executer Reste encore incertaine; et peut-être c’est à la difficulté de la tracer qu’est du le sommeil léthargique des Princes sur l’addoucissement des Peines.

J’ai dit dans une note de mon livre que j’avais un mémoire tout prêt sur cette matière: ce Mémoire, j’ai eu l’honneur de le presenter du manuscrit à Monsieur, et je ne l’ai point publié, parce qu’il contient des Moyens qui doivent être tenus secrets pour percevoir les fonds nécessaires aux établissemens à faire. Je vous prie, Monsieur, de proposer de ma part au Congrès de l’Amérique un double de ce Manuscrit, auquel j’ai joint des plans de Construction des maisons de Correction. Mes idées sur ce sujet sont plus faites pour la france que pour tout autre Pays; mais je suis certain qu’avec quelques légers changemens, que je ferais même s’il en était besoin, et sur lesquels alors je vous demanderais vos Conseils, je Rendrais ces idées profitables pour l’Amerique.

L’Expérience du ballon de M. Blanchard qui a eu lieu hier ne laisse aucun doute sur le parti qu’on peut tirer des divers courans d’air qu’on trouve à différentes hauteurs de l’atmosphère. Il a suivi pour tout le monde deux directions opposées; je vous atteste moi lui en avoir vu prendre deux autres encore presqu’aussi contraires. J’ignore le Compte qui va en être Rendu; mais je persiste à croire que c’est au vent que nous devons la possibilité de la direction de nos ballons, encore plus que nous ne lui devons la navigation sur la mer; et vous aurez encore sur cette découverte par l’observation fine de la direction des courans d’air de deux appartemens dont l’un est échauffé et l’autre froid, vous y aurez, dis-je, des droits certains.

Je suis avec un profond respect, Monsieur, Votre très humble et très obéissant serviteur

Dufriche de Valazé

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